«On peut interdire Tawassoul, mais pas ses idées»

Article : «On peut interdire Tawassoul, mais pas ses idées»
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13 mai 2016

«On peut interdire Tawassoul, mais pas ses idées»

confpress Tawassoul

Dans le siège flambant neuf de son parti, sur la route de la mairie du Ksar, le président Mohamed Jemil Mansour du parti Rassemblement national pour la réforme et le développement (Tawassoul), d’obédience islamiste, est revenu sur les principaux thèmes à l’ordre du jour, notamment le discours du président Mohamed Abdel Aziz le 3 mai dernier à Néma et les sorties intempestives de ses partisans, en particulier l’un des chargés de mission de la présidence de la République qui a miroité en l’air la dissolution de sa formation politique. «On ne tue pas une idée portée pendant des décennies par des hommes et des femmes déterminées » a-t-il répondu.

La salle de conférence du parti Tawassoul, sis au Ksar, avait refusé du monde hier, mercredi 11 mai 2016. Entouré de quelques uns de ses collaborateurs, le timonier du parti Rassemblement national pour la réforme et le développement, Mohamed Jemil Mansour, a d’emblée tracé les grandes lignes de son intervention, face à un parterre de journalistes dont certains travaillant pour des chaînes étrangères. «En tant que parti, nous avons convoqué cette conférence de presse pour donner notre avis sur les questions de l’actualité chaude, notamment la crise multiforme que vit aujourd’hui la Mauritanie, mais aussi les contradictions présidentielle et les tentatives menées actuellement pour recadrer son malheureux discours de Néma ». Il considère que le discours politique et les échanges entre acteurs de la scène nationale doivent rester dans  les limites du respect et de la responsabilité, soulignant que chacun «doit assumer ses paroles et ses actes ou à défaut avoir assez de courage pour reconnaître ses erreurs et demander pardon à qui de droit ». Un discours clair, dira-t-il en substance, n’a pas besoin de campagne de clarification et d’explication.
«Nous à Tawassoul nous mesurons nos mots et nos actes, puis nous prenons entière responsabilité de ce que nous avons dit ou posé comme action » a-t-il ajouté
Pour le président en fin de mandat du parti islamiste Tawassoul, Jemil Ould Mansour, deux camps coexistent sur la scène nationale, celui des démocrates, soucieux du fonctionnement des institutions de la République, respectueux de la diversité du pays et attaché à l’unité de son peuple et à sa cohésion, et celui des partisans du pouvoir, qui se battent pour maintenir le statu quo, qui pillent les ressources, sèment la corruption et la gabegie. Dans cette situation de dichotomie, le parti Tawassoul par la voix de son président déclare ainsi vouloir clarifier sa position et se déclare adepte du camp des réformateurs et des bâtisseurs.

Une crise multiforme
Pour Ould Mansour, le discours du président à Néma est plein d’insultes, précisant que jamais des insultes n’ont été aussi équitablement distribuées, car elles n’ont épargné selon lui, ni les Harratines, ni les femmes et encore moins l’opposition. Selon lui, la situation générale du pays est marquée par une crise multiforme, économique, sociale et politique. «La hausse intempestive des prix et le niveau élevé de la vie écrase les faibles et n’épargne maintenant plus les nantis » a-t-il fait remarqué, soulignant qu’à ce rythme, «personne n’écoute plus les chiffres, surtout s’ils n’impactent pas directement dans la vie quotidienne ». D’ailleurs, précisera-t-il, «nous avons de mauvais souvenirs avec les chiffres », faisant allusion aux «faux chiffres de la Mauritanie dénoncés par le FMI dans les dernières années de règne de Ould Taya. «Ces manipulateurs sont toujours présents avec autant de force dans les postes de commandement » dira-t-il.
Mohamed Jemil Mansour a également relevé les «engagements non tenus du pouvoir », citant les réalisations jamais achevées et éternellement inaugurées, dans le domaine des routes, des industries, citant notamment la fameuse mosquée à 15.000 places qui devait voir jour avant les législatives de 2013. «Le pouvoir actuel est empêtré dans la mauvaise gestion et l’incurie » notera-t-il. «Il se lamente aujourd’hui sur la baisse du prix des minerais, dont le fer, alors qu’il avait manqué de vision et de prévisions durant la période des vaches grasses lorsque le prix de ces minerais avaient atteint des sommets insoupçonnés »a-t-il noté. Il a aussi évoqué l’état-civil qui a créé des milliers d’apatrides notamment au sein des rapatriés du Sénégal et de la diaspora mauritanienne à l’étranger. Le problème de l’enrôlement et de l’esclavage constituent pour Mohamed Jemil Mansour les deux plus grands fléaux que le pouvoir actuel a planté sur le dos de l’unité nationale et de la cohésion sociale, soulignant que l’absence d’égalité et d’équité entre les citoyens du pays est le plus grand danger qui peut le menacer. Selon lui, une nation qui laisse en rade une composante de sa population est vouée à l’implosion, trouvant que les victimes des séquelles de l’esclavage, les Harratines en l’occurrence, doivent bénéficier d’une politique de discrimination positive pour rattraper leur retard historique. Mohamed Jemil Mansour trouve que dans un Etat de droit qui se respecte tous les citoyens sont traités d’une façon égale nonobstant leur appartenance et leur couleur. «En cela, l’Islam offre un modèle parfait de cohésion sociale et d’unité nationale » a-t-il martelé.

On ne touche pas à la Constitution
Abordant la Constitution et ce que le président en a dit à Néma, puis ses partisans par la suite, Mohamed Jemil Mansour juge que les Mauritaniens sont toujours dans l’expectative tant le discours à ce niveau reste flou, ambigu et indécis. A ce propos, il a cité le président du parti UPR (Union Pour la République, parti au pouvoir) qui, interpellé à propos des articles de la Constitution qu’ils veulent modifier, a répondu qu’ils ne les ont pas encore déterminés. Ou encore le porte-parole du gouvernement pour qui le président donnera une répons à ce propos en  2019, c’est-à-dire vers la fin de son mandat.
«A Tawassoul et au FNDU, le jeu du pouvoir par rapport à la Constitution reste imprécis, plein d’allusions et de sous-entendus »  a affirmé Mohamed Jemil Mansour qui a mal jugé l’attitude du président Mohamed Abdel Aziz à Néma lorsqu’il exprima son satisfecit par rapport à la sortie antérieure de ses ministres sur le 3ème mandat, allant jusqu’à prendre comme citation  les propos de son ministre de la Justice, qui avaient soulevé pourtant un tollé d’indignation sur la scène politique. «A notre niveau, nous disons qu’il n’est pas question de toucher à la Constitution » a déclaré Ould Mansour.

Dialogue politique
Par rapport au dialogue politique, il trouve que Mohamed Abdel Aziz en a déjà fixé la date, dans trois à quatre semaines, défini le contenu, fixé les participants (ceux qui le souhaitent) et dégagé le résultat, à savoir un référendum constitutionnel. «Comment voulez-vous que l’on participe à un dialogue préalablement plié, dans sa date, son contenu, ses participants et ses conclusions » a-t-il ajouté. Pour Mohamed Jemil Mansour, cette attitude ne fait que donner raison davantage au FNDU qui refuse d’aller à un tel dialogue et exige des préalables de nature à rétablir la confiance. Il trouve d’ailleurs incongru qu’aux insultes de Mohamed Abdel Aziz à Néma, auxquels se sont ajoutées les insultes de ses partisans lors de leurs multiples sorties télévisées, le pouvoir ait encore le culot de les traiter en partenaires à un dialogue politique.
Sur les allusions de dissolution du parti Tawassoul, diabolisé par le président Mohamed Abdel Aziz qui les accuse d’importer des idées de l’extérieur et vilipendé par son chargé de mission Ould Ahmed Damou lors d’une sortie télévisée, Ould Mansour  souligne que Tawassoul est une idée et une idéologie avant d’être un parti politique. «Un groupe de femmes et d’hommes est porteur d’une flamme et d’un programme de société auquel adhèrent aujourd’hui des milliers de Mauritaniens et nous continuerons à exister quel que soit le cadre dans lequel nous  évoluerons » a-t-il déclaré.

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