Carnet de voyage au Madagascar

Article : Carnet de voyage au Madagascar
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20 novembre 2016

Carnet de voyage au Madagascar

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Quatre heures ! C’est ce qu’il a fallu pour avaler les 160 km qui séparent Antananarivo, capitale de Madagascar, à Antsirabe, deuxième ville du pays. Cette route sinueuse, serpentant entre les montagnes, avec des montées vertigineuses et des descentes abruptes, n’est pas recommandée aux cardiaques. Surtout avec tous ces nids de poule qui jonchent le trajet, les averses qui tombent sans crier gare et les ravins de plusieurs mètres descendant au dessus de fantomatiques villages tirés par les nuages. Tout au long de ce périlleux périple, quelques maigres étalages artisanaux, des files de gosses, sacs au dos et tenues bleues sur le maigre corps, se tapant des kilomètres pour rejoindre leur famille, malgré la violence des averses. De temps à autres, des couples aux habits trempés, marchands pieds nus, des bâtisses fermés, des marchands stoïques, sacs plastiques sur la tête.

 

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Arrivés aux environs de 2 heures du matin à l’aéroport d’Antananarivo, après un vol de dix heures par la compagnie malgache à partir de Paris pour certains, ou par la Kenya Airways pour d’autres en provenance d’autres régions d’Afrique, les journalistes et leur interminable convoi, ont eu du mal à s’ébranler. Trois heures d’attente, le temps de subir les assauts d’une meute de gosses dépenaillés, venus faire le tapine à 4 heures du matin. Sangsues  dont les voyageurs éreintés ont eu du mal à se débarrasser. Ultime étape, après une halte à Antananarivo, la ville d’Antsirabe, lieu des  45èmes assises de l’Union de la Presse Francophone (UPF).

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Accrochée aux flancs des montagnes, avec ses champs illimités de rizières où des paysans s’échinent à planter du riz à l’aide de charrues tirées par des zébus, Antananarivo, la capitale Malgache est un magnifique jardin suspendu. Elle est restée, malgré les siècles, prisonnière du temps, avec ses vestiges coloniaux et son incroyable métissage. Arabes, Indonésiens, Africains, Britanniques puis Français ont chacun eu le temps de la marquer de ses empreintes indélébiles. Avec une taille moyenne de 1, 65 mètre, les Malgaches sont de petits êtres, avec des traits asiatiques prononcés. L’extrême pauvreté  des Malgaches se lit sur leurs visages déteints, mais aussi dans ces longues processions pieds nus le long des routes, dans leur accoutrement, dans les rues en tuiles rouges, dans l’état défectueux des routes, dans ces nuées de gosses mendiants et ces multiples demoiselles à peine nubiles, accrocheuses jusqu’à la nausée. Mais ils restent un peuple travailleur et fier. Un euro équivaut à 3.430 ariary, la monnaie locale. Un hamburger coûte 14.000 ariarys, moins de 4 euros (1.600 UM).

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Après un repas copieux et un succinct briefing au restaurant-hôtel «Le Duc de la Ruche», direction Ambohimanga, avec son musée historique et sa forêt sacrée, classée en 2001 Patrimoine culturel mondial. C’est là où vécurent du 16ème au 18ème siècle, les Rois et les Reines qui ont fondé Madagascar. Le roi-bâtisseur, Andrianampoinimerina (1789-1810), puis ses successeurs jusqu’à la dernière reine, Ranavolana II, déportée par les Français en 1897. Accompagné par les explications nasillardes de Mme Ramangazon, l’un des nombreux guides du parc, le petit groupe qu’elle dirigeait a eu le loisir de visiter le Palais royale et le Palais d’été, conservés en l’état, malgré de nombreuses rénovations. Ensuite, la colline royale avec vue magnifique sur Antananarivo et sa forêt sacrée de 59 hectares. Le «Baldaquin du Roi», conservé en l’état et que des armées d’esclaves hissaient sur leurs épaules dans ses déplacements. La «Fosse à bœufs » où l’on parquait les animaux prêts pour l’abattage à l’occasion de rituels religieux ou de fêtes populaires offertes par la famille royale. Le Palais d’été de la reine, sa chambre à coucher, en bois de paillasson, comme tout le reste des bâtiments royaux, meubles classiques, style britannique, avec le «Miroir de la Vérité » offerte par la Reine Victoria d’Angleterre. La salle du conseil des ministres, avec son double encrier en argent et ses couvercles en forme de bouquins  miniaturisés. Ameublement sophistiqué, œuvre de Jean La Borde, un aventurier belge qui échoua dans les années 1800 sur les berges d’Antananarivo. Enfin, la chambre du roi et son lit suspendu au plafond et par lequel il accédait par de minuscules escaliers, presqu’invisibles. Là-haut, il écoutait les visiteurs que la Reine introduisait. S’il voulait recevoir le visiteur, il jetait une pierre et la reine entraînait son hôte dans une autre pièce, le temps que le roi descende de son perchoir. Si aucune pierre ne tombe, la reine éconduit le visiteur en lui disant que le roi est absent. Le nombre des ennemis poussait à cette prudence, soutient-on. On s’introduisait dans son palais en avançant le pied droit et on en sortait à reculons, le pied gauche devant.

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C’est là, dans cette ville d’Antsirabe, plus précisément à l’Hôtel des «Thermes » qui abrite les travaux de l’UPF et qui s’apprête à accueillir le Sommet de la Francophonie, que les Français avaient déporté en 1954 le Roi Mohamed V du Maroc. Son petit fils, Mohamed VI, hôte d’Antsirabe, s’apprête à y commémorer cet important pan colonial de l’histoire chérifienne.

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