Festival des Villes Anciennes : Ouadane sous le sceau du communautarisme

Article : Festival des Villes Anciennes : Ouadane sous le sceau du communautarisme
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19 décembre 2016

Festival des Villes Anciennes : Ouadane sous le sceau du communautarisme

De l’avis de plusieurs observateurs, le Festival des Villes Anciennes dans sa 6ème édition qui vient de s’achever à Ouadane, s’est drapé d’un dangereux vernis communautariste. Maures du Sahara, du Mali et de Mauritanie dans une réelle et exclusive communion.

Sans que le pouvoir ne s’en rende peut-être pas compte, certains dans l’entourage des hautes autorités tirent de plus en plus insidieusement sur la ficelle communautariste. La preuve, la 6ème édition du Festival de Ouadane, qui a eu lieu du 12 au 16 décembre 2016, fut une véritable communion entre les Maures du Sahara Occidental, ceux du Mali et de Mauritanie. Selon certaines confidences, l’accent a été mis sur l’aspect communautaire en ce qui concerne les artistes qui devaient représenter les pays invités. Au lieu de convier des Touarègues ou des troupes bambaras du Mali, l’exigence porta sur des Maures de Tombouctou. Certains se sont aussi demandés pourquoi ne pas avoir invité des troupes folkloriques du Sénégal, même au sein de la communauté maure, avant que l’on se rende compte que cette dernière est quasiment composée de harratines. D’où ce raisonnement presque raciste ou raciale que d’aucuns ne manqueront de relever avec indignation, mais la donne communautariste semble hélas, dans cette Mauritanie de la dernière décennie, être érigée en mode de gouvernance politique.
Sinon, comment expliquer la reconnaissance officielle d’un parti politique aussi communautariste, raciste et raciale, que celui de Daoud Ould Ahmed Aïcha qui ne se cache pas d’avoir crée «un parti pour les Maures » pour contrer selon lui les discours extrémiste des Flams et de l’IRA, qui eux butent sur un systématique refus de reconnaissance.
Cette velléité de plus en plus forte de la communauté maure à s’affirmer comme composante majeure de la population mauritanienne et à laquelle doivent s’assimiler toutes les autres composantes du pays ou disparaître, trouve ainsi toute sa quintessence dans le propos de Mohamed Ould Abdel Aziz, le Président de la République, selon lequel «les Maures forment la majorité en Mauritanie ». Voir sa dernière interview avec le journal français «Le Monde».
Ainsi, si en France, le repli identitaire autour du «Français pure souche » fait le lie du radicalisme politique, en Mauritanie, l’identité maure menacée par le «péril noir » avec la jonction tant redoutée entre «Harratines et Négro-mauritaniens» qui se dessine de plus en plus, fait germer un sentiment de peur. D’où l’option de rassembler la grande fratrie éparpillée, du Sahara algérien au Sahara marocain jusqu’aux confins de l’Azawad (Trab el bidhane), approche prônée par un certain Ould Breidelil, mais aussi à réinventer «une résistance maure contre l’envahisseur français» comme socle unificateur de la communauté autour d’un vécu commun.
Vu sous cet angle, l’on comprend tout le machiavélisme qui se cache derrière l’enrôlement biométrique, qui ne sert pas seulement à viabiliser les pièces d’état-civil en réalité, mais à procéder à des purges raciales dans les rangs des négro-mauritaniens et surtout des harratines, accusés de se «reproduire dans tous les coins de rue». Dixit, le discours de Mohamed Ould Abdel Aziz à Néma.
Ainsi, d’un festival culturel qui était sensé ressouder les liens intercommunautaires, les chauvins aujourd’hui au pouvoir cherchent à en faire le symbole de la suprématie d’une communauté au détriment de toutes les autres. D’où, l’anachronisme d’un pays supposé multiethnique, où la quasi-totalité des hiérarchies militaires et civils est à une seule dominance ethnique.
D’où ces images en apparence inoffensives de civils armés qui fleurissent le plus normalement du monde sur les réseaux sociaux, ou encore ces menaces d’assassinat proférées  sur la place publique en toute impunité, alors qu’émanant des autres communautés, de telles attitudes auraient débouché sur des arrestations, des répressions et des procès tous azimuts.
Sinon encore une fois, pourquoi ni le Président de la République, ni son Premier ministre, n’ont daigné honorer de leur présence la plus grande manifestation de la communauté Soninké, celle qui a regroupé tous les Soninkés du monde ici à Nouakchott ? Pourquoi, les manifestations culturelles chapeautées par des membres des autres communautés sont systématiquement séchées par le ministre de tutelle et le moins gradé de son département, alors qu’ils se bousculent au portillon du moindre évènement organisé par la plus obscure association dirigée par quelqu’un de leur fratrie ?
Nonobstant les accusations qui ne manqueront pas de pleuvoir sur ce constat de notre amère et désolante réalité et que d’aucuns pourraient traiter de raciste ou d’hostile à la Nation, bref tout ce terrorisme intellectuel mis en branle dès que l’on touche la plaie qui ronge le pays, nous appellerons un chat un chat.
La Mauritanie est hélas tombée aujourd’hui entre des mains chauvines, celles qui ont toujours tripatouillé dans la fange anti-noire et anti-harratine et qui disposent maintenant de l’arsenal politique, prêtes à dégainer pour faire prévaloir sa funeste idéologie.

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