Présidence de la Commission africaine : une course serrée et des noms sortent du lot

Article : Présidence de la Commission africaine : une course serrée et des noms sortent du lot
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27 janvier 2017

Présidence de la Commission africaine : une course serrée et des noms sortent du lot

Siège de l’Union Africaine à Addis-Abeba (Photo google)

Les tractations vont bon train dans les coulisses du siège de l’Union Africaine à Addis-Abeba, à quelques heures d’une élection décisive : celle du prochain président de la Commission de l’Union Africaine.

Cinq grandes pointures de la scène africaine sont sur la sellette. Il s’agit de Pelonomi Venson Moitoi du Botswana, Moussa Faki Mahamat du Tchad, Agapito Mba Mokuy de la Guinée équatoriale, Amina Mohammed du Kenya et Abdoulaye Bathily du Sénégal. Les pronostics vont bon train ainsi que les spéculations, mais personne ne sait encore celui ou celle qui va succéder à la Sud’Africaine Nkosazana Dlamini-Zuma, dont le mandat a expiré depuis six mois.

Lors du 27ème sommet de l’Union Africaine qui avait eu lieu à Kigali (Rwanda) aucun des trois candidats à sa succession n’avait pu obtenir les deux tiers des votes nécessaires en trois tours de scrutin. L’élection fut ainsi reportée jusqu’au présent sommet, le 28ème qui se tient depuis le22 janvier dernier à Addis-Abeba (Ethiopie). Parmi les trois malheureux candidats de 2016, seule l’Ougandaise, Speciosa Wandira-Kazibwe  a désisté, alors que ses deux concurrents de l’époque, la Bostwanaise, Pelonomi Venson-Moitoi et l’Equato-guinéen Agapiton Mba Mokuy rempilent.

Mais selon les premiers sondages, le Sénégalais Bathily, la Kenyane Amina et la Bostwanaise risquent de sortir du lot au premier tour.

Si certains raisonnent en termes de régions, pour spéculer sur les candidats qui ont plus de chance de s’en sortir en fonction du nombre de pays de leur zone respective, d’autres pensent que les intérêts géopolitiques de chaque Etat membre pèsera lourd sur la balance. Ainsi, ni la stature encore moins les compétences des uns et des autres, ni la lourdeur des back-ground encore moins la longueur des diplômes ou la solidité des expériences ne seront décisives. Les intérêts et seuls les intérêts que chaque Etat pourra tirer de cette élection vaudront monnaie de change et devise forte. Encore faudrait-il à ce titre que chaque représentant  s’en tienne aux consignes de vote de son pays. Cela aurait été possible si le scrutin se faisait à main levée. Mais, la nature secrète du vote fera que les consignes données par tel pays ou tel autre à son représentant n’aura aucun poids. Seuls les porteurs de carton négocieront leur bulletin en fonction de leur penchant ou de la force de persuasion des candidats-courtisans.

Si l’on en tient aux raisonnements des  tenants du vote régional, le Sénégalais Bathily et la Kenyane Amina devraient largement l’emporter, avec 16 pays d’Afrique de l’Ouest qui soutiendraient le premier et 15 pays d’Afrique de l’Est pour la seconde. Les autres candidats, notamment les deux d’Afrique Centrale, le Tchadien Mahamat et l’Equato-Guinéen Agapito devront se partager la voix des huit pays qui composent leur ensemble, alors que la Botswanaise Pelonomi aura elle seule les huit pays d’Afrique Australe.
Mais selon de nombreux diplomates rencontrés dans les coulisses, ce raisonnement ne sera nullement déterminant.

Cheikh Aidara

 

Biographie des 5 candidats à la Présidence de la Commission de l’Union Africaine

Abdoulaye Bathily

Abdoulaye Bathily (photo google)

Historien, universitaire et homme politique sénégalais, Abdoulaye Bathily a été plusieurs fois ministre, sous Abdou Diouf ensuite sous Macky Sall. Pendant 29 ans, chef de file de la Ligue démocratique/Mouvement pour le parti du travail (LD/MPT), ce soninké originaire de la Vallée, département de Bakel est né en 1947. Il en sera le député en 2001.
Professeur d’histoire moderne et contemporaine à l’Université de Dakar, ce sortant de Birmingham sera d’abord ministre de l’Environnement dans le gouvernement de Habib Thiam, puis ministre de l’Energie et des Mines sous Moustapha Niass en 2000 avant de prendre la tête de l’Assemblée nationale sénégalaise. Il sera en 2007, le candidat malheureux de ces élections avec moins de 3% des voix et fut nommé par Macky Sall en 2012 comme ministre d’Etat à la Présidence de la République.
En juillet 2013, il cède son fauteuil à la direction du LD/MPT  à Mamadou NDoye.
En campagne au Mali en décembre 2016 pour sa candidature à la présidence de la Commission de l’Union Africaine, cet habitué des couloirs des Nations Unis, médiateur dans la crise au Burundi et envoyé spécial du Secrétaire Général de l’ONU pour l’Afrique centrale, trouve que sa candidature est en droite ligne de son engagement «pour l’Afrique, pour les peuples africains, leur libération, leur autonomie » soulignant que le faire en sorte que l’Afrique devienne un acteur majeur de la vie internationale, est un combat d’une vie.

Amina Mohamed Jibril

Amina Mohamed Jibril (photo google)

Depuis 2013 ministre des Affaires étrangères du Kenya, Amina Mohamed Jibri est la première femme à occuper un tel poste dans son pays. Née en octobre 1963 de parents Somaliens, elle est diplômée en maîtrise en droit de l’Université d’Etat Taras-Chevtchenko de Kiev en Ukraine. Elle épinglera dans son back-ground un Master en droit de l’Université Strathmore, puis en 1993 un autre Master en Relations internationales de l’Université d’Oxford.
Amina Mohamed suivra une carrière professionnelle riche, directrice juridique, puis conseillère au Ministère des Affaires étrangères du Kenya, puis à la mission diplomatique de son pays auprès de l’Office des Nations Unies à Genève. En 1997, elle est conseillère juridique de la mission diplomatique du Kenya auprès du Conseil de sécurité des Nations Unies. Elle occupera plusieurs postes de haute responsabilité dans son  pays avant d’être nommée par Banki-Moon, encore Secrétaire générale des Nations Unies, au poste de directrice exécutive adjointe du Programme des Nations Unies pour l’Environnement. Elle part en tout cas en compétition pour le siège de présidente de la Commission de l’Union Africaine forte du soutien d’un Chef d’Etat d’Afrique de l’Ouest, Faure Gnassingmé du Togo, qui le lui a signifié lors de sa visite à Nairobi en octobre 2016.

Agapito Mba Mokuy

Agapito Mba Mokuy (Photo google)

C’est le plus jeune parmi les candidats. Né le 10 mars 1965 au Nord-Est de la Guinée Equatoriale, Agapito Mba Mokuy est membre du PDGE (parti démocratique de la Guinée Equatoriale). Ancien fonctionnaire de l’UNESCO, ministre des Affaires étrangères de son pays depuis 2012, il est titulaire d’un Master en business administration obtenu à l’Université de Bangkik (Thaïlande), d’une licence en économie agricole de l’Université de Louisiane (USA) et d’un certificat double compétence en Management et communication de l’Institut de San Diego en Californie (USA). Il parle couramment l’espagnol, le français, l’anglais et le portugais.
Agapito est un cadre du système des Nations Unies, consultant au PNUD sur les questions économiques en 1991, puis près de 20 ans à l’UNESCO.
Membre du Bureau politique du PDGE depuis 2010,il a été nommé la même année par le Chef de l’Etat Equato-Guinéen comme son conseiller aux Affaires africaines. Il a joué un grand rôle lors de la présidence de l’Union Africaine assurée par son pays de 2011 à 2012. Nommé à la tête de la diplomatie de son pays, il a été reconduit dans l’équipe gouvernementale en 2015 et a présidé à ce titre tous les sommets de grande envergure que la Guinée-Equatoriale abrite depuis sa nomination.

Moussa Faki Mahamat

Moussa Faki Mahamat (Photo google)

Premier ministre du Tchad de 2003 à 2005, Moussa Faki Mahamat est membre du MPS (Mouvement patriotique du Salut) présidé par Idriss Déby Itno. Né en 1959, l’Afrique le découvre lors d’un débat qui avait opposé en 2016, les candidats à la succession de Nkosazana Dlamini Zuma, présidente de la Commission de l’Union Africaine. Sa déclaration selon laquelle «l’Union africaine a besoin d’un leadership affirmé… » et qu’il faut «se recentrer sur l’essentiel», soulignant que «depuis 2002, nous avons adopté aux alentours de 1 800 décisions et résolutions et moins de 15% ont été réellement mises en œuvre » a fait mouche.
Ce franc-parler d’un candidat au plus haut poste diplomatique au sein de l’Union Africaine a forcément attiré l’attention, d’autant que le langage de bois est le trait dominant dans les allées d’Addis-Abeba. Pourtant, Moussa Faki Mahamat n’en est pas moins un diplomate chevronné, un fin négociateur doublé d’un homme politique, selon ceux qui le connaissent.
Avec trente ans d’expériences dans les affaires de l’Etat tchadien, Moussa Faki a été plusieurs fois ministre, directeur de cabinet du président Déby, chef de gouvernement. Depuis 2008, ministre des Affaires étrangères, il a suivi tous les dossiers stratégiques de Jean Ping à Nkosazana au niveau de la Commission de l’Union Africaine.
En briguant la présidence de la Commission, Moussa Faky compte mettre toute cette expérience, notamment dans les questions de paix et de sécurité, au service du continent.
Le Tchadien est titulaire d’un Doctorat en Droit Public de l’Université Paris XIII, après un DESS en Droit Public obtenu à l’Université Marien NGouabi de Brazzaville (Congo) en 1986. Beaucoup le donne comme partant, même si ses chances dans les coulisses d’Addis-Abeba restent faibles, selon certains spécialistes interrogés.

Pelonomi Venson Moitoi

Pelonomi Venson Moitoi (Photo google)

Née en 1951, Pelonomi Venson Moitoi est journaliste et femme politique du Botswana, Secrétaire général adjointe du Parti démocratique de 1999 à 2004, députée puis ministre de 2000 à 2010.
Cette diplômée de l’Université du Michigan (USA), a débuté sa carrière politique à l’Assemblée nationale du Botswana en 1999. Entre 2001 et 2002, elle est nommée ministre des Travaux Publics, des Transports et des Communications, puis ministre du Commerce, de l’Industrie, de la Faune et du Tourisme de 2002 à 2002, ensuite ministre de la Communication, de la Science et de la Technologie en 2004, poste qu’elle quittera puis reprendra en 2009 avant d’aller à l’Education Nationale.
En 2013, elle est pressentie à la tête du parti BDP, ce qui dénote de l’importance qu’elle a prise sur l’échiquier politique national. En 2014, elle prend la tête de la diplomatie botswanaise.
Candidate à la présidence de la Commission de l’Union Africaine en 2016, elle rempile encore, espérant profiter du 28ème Sommet des Chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union Africaine pour prendre la succession de la Sud’Africaine Nkosazana.

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