Visite présidentielle à Néma : Tribus et courants politiques en ordre de… bétail

Article : Visite présidentielle à Néma : Tribus et courants politiques en ordre de… bétail
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6 mai 2016

Visite présidentielle à Néma : Tribus et courants politiques en ordre de… bétail

nema

Vingt-quatre heures avant l’arrivée du président Mohamed Abdel Aziz, attendu le 3 mai 2016 à Néma, c’est l’effervescence des joutes politiques. Tribus et clans adverses se livrent une guerre de positionnement. Toute la panoplie communicationnelle est ainsi déployée dans la fièvre des grands rendez-vous. Objectif, taper dans l’œil du président et démontrer sa fidélité, réelle ou feinte, à travers la mobilisation, même si c’est en ordre de…bétail !

Néma n’a pas réellement changé en deux décennies. Le décor est le même, celui d’une cité antique qui tente de se moderniser à petits pas. C’est toujours cet entassement de pierrailles à l’ombre de la ceinture montagneuse. Toujours cette antique muraille géante à tunique ocre qui veille sur l’architecture plate d’une ville qui commence à donner peu à peu place aux couleurs.
Certes, quelques bretelles goudronnées ont été rajoutées ici et là, mais Néma reste une cité rébarbative à tout progrès.
A la veille de la visite présidentielle, l’afflux des cadres ressortissants du Hodh Charghi et d’autres venus d’autres régions pour squatter une portion de visibilité  bat son plein. Le contraste reste cependant saisissant entre ces processions de bolides derniers cris, dominés par un flot de V8 rutilants, et  la misère du décor ambiant, fait de maisons en banco à la couleur neutre, et un circuit goudronné réduit à sa plus simple expression.  Ce qui donne lieu à des embouteillages monstre et un parc roulant dix fois plus important que la capacité d’accueil au niveau local. A ce rythme, les équipes du Groupement de la Routière dépêchés sur place depuis Nouakchott, se trouvent débordés pour réguler une circulation aussi infernale que la chape de plomb thermique qui s’abat sur Néma, où le thermomètre affiche allègrement ses 45 à 50° de chaleur à l’ombre.
Mais la chaleur des empoignades reste encore plus élevée sur le plan politique. Deux clans s’affrontent sur le terrain, les partisans du Premier ministre Yahya Hademine et ceux du ministre Secrétaire général de la présidence de la République, Moulaye Mohamed Laghdaf. Entre les deux, d’autres forces tentent de se rendre visibles, notamment les Ehel Taleb Mokhtar, agglutinés autour de leurs cadres, l’ambassadeur Mohamed Lemine Ould Aboye et Dieh Ould Sidaty, entre autres. D’autres courants qui s’estiment lésés dans leurs prérogatives boudent presque toute cette campagne fiévreuse, notamment les Chorfas de Néma considérés comme les véritables fondateurs de la ville. Dans cette empoignade, d’autres tribus tentent d’émerger, en particulier les Kounta et les Joumane.
Au centre-ville, l’ex-maison de Hamada Derwich ne désemplit pas. C’est ici où beaucoup de cadres venus de Nouakchott ont déposé leurs baluchons.
Ehel Ghadde, qui semble désormais disposer de l’exclusivité des accueils présidentiels, s’active sur le terrain de football de Néma, un grand espace vide, sans clôture et sans gradin. L’estrade lumineuse prend peu à peu forme, sous l’œil vigilant du Wali du Hodh Charghi, Mohamed  Ould Belamech, le visage à demi masqué par un turban à demi teint.
Et l’usine de lait dans tout ça, cette bâtisse bleue dont l’inauguration constitue l’un des points essentiels de la visite du président Mohamed Abdel Aziz ? C’est le flou total sur cette unité qui constitue l’un des maillons les plus importants du projet «Progrès Lait » financé à coups de milliards d’ouguiyas dans un partenariat à moitié financé par l’Union européenne, entre la Mauritanie et le Sénégal. Jusqu’à la veille de la visite présidentielle, les interrogations persistaient encore sur cette usine. Le président va-t-il l’inaugurer ou pas ? Même la ministre de l’Elevage et son équipe semblaient encore indécis et gênés à quelques heures de l’arrivée du président de la République, car en toute apparence, tout ne serait pas encore au top. Des insuffisances techniques seraient évoquées, ce qui pourrait coûter à la ministre et à son staff leur poste, de l’avis de plusieurs observateurs.

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