« Libertés publiques, Hausse des prix, Dialogue social », le point de vue de Birame Dah Abeid

20 janvier 2021

« Libertés publiques, Hausse des prix, Dialogue social », le point de vue de Birame Dah Abeid

Le député Birame Dah Abeid, leader de l’Initiative de Résurgence du mouvement Abolitionniste (IRA), a animé, mardi 19 janvier 2021 à Nouakchott, une conférence de presse au cours de laquelle il est revenu sur plusieurs questions de l’actualité. Il s’agit notamment, de la situation des libertés publiques en Mauritanie, la hausse vertigineuse des prix des denrées de première nécessité et le dialogue sociale en vue.

Birame (en costume) entouré de ses collaborateurs – Crédit Aidara

Birame Dah Abeid, député et président du mouvement IRA, a fait le tour des questions qui préoccupent aujourd’hui l’opinion publique nationale. Il s’agit de la persistante entrave aux libertés publiques, dont celle de manifester (article 10 de la Constitution de la Mauritanie), la hausse vertigineuse des prix des denrées de première nécessité et le dialogue en vue entre les acteurs sociaux. Toutes ces questions ont été abordées au cours d’une conférence de presse qu’il a animée mardi 19 janvier 2021 à Nouakchott.

Loi sur les associations, un actif fort du président Ghazouani

Déclinée en deux points, la situation des libertés publiques en Mauritanie semble particulièrement interpeller Birame Dah Abeid. Il s’est félicité du climat d’ouverture initié par le président Mohamed Cheikh Ghazouani, et ses prédispositions à régler les crises multiformes. L’ancien candidat à la présidentielle de 2019 s’est également félicité de l’adoption par l’Assemblée Nationale, le 11 janvier dernier, de la loi sur les associations (le texte adopté doit être promulgué par le Président de la République et publié au journal officiel avant d’être rendu public). Celle-ci remplace et abroge la loi de 1964, dite aussi loi des autorisations préalables, jugée dictatoriale, antidémocratique et contraire à l’esprit des droits de l’homme.

Le député El Id Mohameden du Rassemblement des Forces Démocratiques (RFD), parti d’opposition, partage le même satisfecit.

https://essahraa.net/fr/html/01152021-1624

« Cette nouvelle loi, basée sur le régime déclaratif est plus conforme à la Constitution et aux principes d’un Etat de droit, car il consacre la liberté d’association et de regroupement » a-t-il précisé. Une transition qui permettra au député d’expliquer son absence des prétoires de l’Assemblée Nationale. Cette loi est, selon lui, le fruit de longues discussions avec Ghazouani. « Pourquoi se mettre en opposition avec le gouvernement et aller à la confrontation dans les allées du Parlement, s’il existe une alternative. C’est-à-dire,. une voie plus pacifique et plus efficace pour obtenir des concessions en faveur des Mauritaniens, en passant par l’oreille attentive du premier décideur du pays » s’est-il défendu.

Il a aussi évoqué les dernières manifestations qui ont secoué Nouakchott ces derniers mois. La plupart ont été durement réprimées par les forces de l’ordre. Il a vivement condamné ces répressions, fustigeant au passage des « fonctionnaires qui n’ont pas encore compris que les réflexes des régimes d’exception sont révolus ». D’après Birame, ces images ternissent les efforts déployés par les autorités actuelles dans leur élan d’apaisement et d’ouverture de la scène politique et sociale.

Il a également reconnu une part de responsabilité de certains manifestants qui ne se seraient pas conformé, selon lui, aux règles de base d’une manifestation pacifique. Et de donner l’exemple du mouvement IRA. Ces membres, a-t-il dit, sont les plus réprimés dans l’histoire de la Mauritanie. Leurs actions ont été également les plus soutenues par la communauté internationale, car conformes aux principes universels des manifestations pacifiques.

Des citoyens livrés au diktat des hommes d’affaires

A entendre Birame Dah Abeid, la Mauritanie serait devenue une jungle où les plus faibles sont laissés à la merci des plus forts. Sans aucun arbitrage de l’Etat et dans l’impunité des gros commerçants. Tous les prix ont doublé, selon Birame, qui note au passage que les ménages mauritaniens n’ont plus le pouvoir d’assurer les repas quotidiens. Une situation exacerbée par un taux de chômage considéré comme l’un des plus élevés au monde.

https://cridem.org/C_Info.php?article=744903

A cela se serait ajoutée l’omnipotence des employeurs, face à la démission de l’administration du travail. A en croire le président du mouvement IRA, les travailleurs mauritaniens sont livrés aux humeurs de leurs patrons. Même les décisions judiciaires en faveur des travailleurs n’ont aucune force d’exécution, selon lui. Il affirme ainsi avoir intercédé plusieurs fois auprès de certains employeurs pour obtenir tout ou une partie de leurs droits. Cette situation a abouti, dit-il en substance, à la décadence des syndicats, brisant ainsi la chaîne de protection du monde productif.

C’est dans ce cadre qu’il a interpellé l’Etat, le président Ghazouani en tête, pour remédier au plus vite à la dérégulation du commerce des produits alimentaires et à la déplorable situation du secteur de l’emploi et du travail. « Pas étonnant dès lors d’assister à l’explosion du cercle de plus en plus élargi des populations démunies et défavorisées. Ce sont elles pourtant qui travaillaient hier dans l’agriculture, l’élevage, la construction de puits, le développement des oasis. Ils se sont trouvés, du jour au lendemain, embarqués dans la galère à cause des injustices sociales » a-t-il déclaré.

Assez de dialogue politique, place au dialogue social

Birame affirme être totalement en phase avec l’intention du président Ghazouani d’engager un dialogue social. Celui-ci touche directement le quotidien des Mauritaniens, d’après lui. . Il souligne que les dialogues politiques successifs qui ont eu lieu en Mauritanie n’ont jamais touché le fond des problèmes auxquels sont confrontés les citoyens. Ils ont été plutôt, dira-t-il en substance, des occasions de marchandages à des profits personnels et des opportunités pour tirer des dividendes politiques individuels.

Des questions comme les conditions de vie des ménages, le chômage, la situation des travailleurs, le partage équitable des richesses, l’unité nationale et la cohésion sociale, l’éducation, la santé, le monde rural, sont plus pertinentes, selon lui. Il reconnaît que certaines questions, comme celles relatives à la Commission électorale nationale indépendante (CENI), au Conseil constitutionnel, au découpage électoral, méritent cependant d’être posées.

Cheikh Aïdara

ENCADRE 1

Les habitants de Hseye Ghabra face au diktat du maire de Néma

Les représentants de Hseye Ghabra. Pr. Khattri (porte-parole) à l’extrême droite – Crédit Aidara

Au cours de la conférence de presse de Birame Dah Abeid, le sort des habitants de Hseye Ghabra, une localité habitée par 18 familles relevant du département de Walata au Hodh Oriental, a été évoqué.

Khattri Ould Ahmed, professeur de Mathématiques et porte-parole des habitants  explique. Selon lui, le maire de Néma, Sidi Mohamed Ould Ahmed Jidou dit Jawda, auquel rien ne les lie administrativement, les empêche de finaliser leur puits. Un ouvrage vital pour subvenir aux besoins en eau potable de la localité.

Fort de son statut de chef traditionnel et d’aristocrate, le maire de Néma jouit, selon lui, de l’appui de l’administration locale, du Wali (gouverneur) au Hakem (préfet), en passant par les chefs de corps et les directeurs des secteurs déconcentrés de l’Etat. La punition qu’il inflige aux habitants de Hseye Ghabra, est d’ordre purement politique, d’après Khattri. En réalité, poursuit-il en substance, l’hostilité du maire s’est manifestée le jour où les habitants de la localité ont décidé de ne plus voter pour lui et de changer de camp politique.

Depuis, ils sont obligés de parcourir des kilomètres par jour pour s’abreuver. A l’en croire, ils ont tapé à toutes les portes et leur dernier recours, c’est le député Birame Dah Abeid. Ce dernier s’est engagé d’après lui, à transmettre leurs doléances et à les accompagner dans leurs démarches auprès des décideurs au niveau central pour réparer l’injustice dont ils sont victimes.

ENCADRE 2

Les partis d’opposition rassemblent leurs forces

Près d’une vingtaine de partis politiques de l’opposition se sont réunis lundi 18 janvier 2021 au domicile de Messaoud Ould Boulkheïr, président de l’Alliance populaire progressiste (APP), figure emblématique de la lutte contre l’esclavage et actuel président du Conseil économique et social.

Messaoud Ould Boulkheïr serait d’ailleurs tombé en disgrâce auprès d’une certaine opinion qui lui reproche ses connivences avec le pouvoir, notamment avec l’ex-président Mohamed Abdel Aziz. Ses détracteurs lui en veulent d’avoir délaissé l’opposition et son combat durant ces dix dernières années en contrepartie de prébendes politiques.

Revenant sur cette rencontre, le vice-président du parti Radical pour une Action Globale (RAG), bras politique du mouvement IRA, Oumar Ould Yali, a donné plus de détail, lors de la conférence de Birame. Il a déclaré que l’opposition s’était réunie après plusieurs mois de léthargie pour rassembler de nouveau ses forces et jeter un regard sur les derniers développements de la scène nationale.

Les échanges qui ont duré selon lui neuf heures d’horloge, de 11heures à 20 heures, ont abouti à la rédaction d’une synthèse. Celle-ci devra être discutée en interne par chaque parti. Une deuxième réunion est prévue pour collecter les recommandations et observations formulées par chaque parti. Le document final consensuel qui en sera tiré, sera transmis, selon lui, au pouvoir en place comme force de proposition.

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