Akjoujt, mise en place de la Plateforme multisectorielle de lutte contre les violences basées sur le genre

Article : Akjoujt, mise en place de la Plateforme multisectorielle de lutte contre les violences basées sur le genre
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22 août 2021

Akjoujt, mise en place de la Plateforme multisectorielle de lutte contre les violences basées sur le genre

La Wilaya de l’Inchiri dispose désormais de sa Plateforme multisectorielle de lutte contre les violences basées sur le genre. Un dispositif mis en place lundi 20 août 2021 par le Ministère des Affaires Sociales, de l’Enfance et de la Famille, avec l’appui du Fonds des Nations Unies pour la Population.

Photo de famille regroupant les autorités, les membres de la Plateformes – Crédit Aidara

« Nous ne disposons pas de chiffres à notre niveau, mais l’ampleur des violences basées sur le genre dans la région de l’Inchiri, en particulier à Akjoujt, est telle que la création d’un mécanisme de lutte contre ce fléau, comme cette plateforme qui vient d’être mise en place, est une nécessité absolue ! »

De G. à Dr. maire d’Akjoujt, le Hakem, le Conseiller du Wali et le Commandant de la Garde – Cheikh Aidara

Cette déclaration de l’imam Mohamed Ali Ould El Boukhary, directeur régional des Affaires Islamiques et président de deux associations locales, celle des Ulémas et celle des Imams, a été cueillie en marge d’un atelier de trois jours, qui a suivi l’installation officielle de la Plateforme multisectorielle de lutte contre les violences basées sur le genre (VBG) en Inchiri. La cérémonie de lancement de ce mécanisme, le 20 août 2021, a été présidée par le Conseiller du Wali Chargé des Affaires Economiques, M. Sayid Ould Sam, en présence du Hakem d’Akjoujt, M. Mohamed Cheikh Ould El Ghowth et du maire de la commune, M. Ahmed Yacoub Ould Chia.

Mise en place officielle de la plateforme

M. Sayid Ould Sam – Crédit Aidara

Ouvrant les travaux de l’atelier de mise en place de la Plateforme de lutte contre les VBG dans la wilaya de l’Inchiri, le représentant du Wali a rappelé que le respect des droits humains est un principe de base de l’Islam. Il a cependant mis en exergue les transformations sociales qui ont entraîné une perversion des mœurs, sous l’effet conjugué de la mondialisation et de l’introduction massive des produits psychotropes. Cela a abouti, selon lui, à la recrudescence des violences, notamment celles faites aux femmes et aux filles. « Cette situation exige que nous unissions nos forces pour faire face à ce phénomène, à travers la mise en place d’outils ou de mécanismes efficaces comme cette plateforme, en droite ligne avec les instructions du Chef de l’Etat, M. Mohamed Cheikh Ghazouani qui accorde une importance particulière aux franges les plus vulnérables, notamment les femmes et les jeunes filles » a-t-il signalé.

Le maire de la commune d’Akjoujt, M. Ahmed Yacoub Chia a abondé dans le même sens, saluant l’initiative d’une telle plateforme qui constitue selon lui, une demande pressante de la part des autorités et des populations locales.

Mme Lebneike Mint Soulé-Crédit Aidara

S’exprimant au nom de la Ministre des Affaires Sociales, de l’Enfance et de la Famille (MASEF), la Directrice de la Promotion de la Famille, de la Femme et du Genre, Mme Lebneik Mint Soulé a déclaré que la mise en place des plateformes multisectorielles de lutte contre les violences basées sur le genre sur l’ensemble du territoire, dont celle en cours à Akjoujt, répond à une situation d’urgence au moment où les violences contre les femmes et les filles prennent de l’ampleur dans le pays. « L’objectif du présent atelier est de réunir dans une plateforme les principaux acteurs qui détiennent une certaine expertise dans ce domaine, parmi les agents de l’Etat et les activistes de la société civile, afin d’assurer la sensibilisation et la coordination pour prévenir et prendre en charge les cas de VBG » a-t-elle précisé. Elle a remercié au passage l’UNFPA pour ses appuis constants aux actions du département des affaires sociales.

Mme Khadijetou Lô-Crédit Aidara

Mme Khadijetou Lô, Chargée du Programme Genre au sein du Bureau UNFPA Mauritanie, a remercié au nom du Représentant résident, M. Saidou Kaboré, le gouvernement mauritanien pour avoir mis dans ses priorités la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles, citant au passage l’intérêt que lui accorde le Président de de la République, M. Mohamed Cheikh Ghazouani dans son programme politique. « C’est dans ce cadre que l’UNFPA vient en appui au MASEF dans la mise en œuvre de ce vaste programme à travers l’installation des plateformes multisectorielles de lutte contre les VBG dans les quinze régions du pays, et en particulier l’évènement qui nous réunit aujourd’hui dans la capitale de l’Inchiri » a-t-elle souligné. Elle a précisé que cette plateforme qui réunit tous les acteurs intervenants dans le domaine de la lutte contre les violences basées sur le genre, est un cadre de coordination, de référence et de contre-référence pour la gestion des cas et l’accompagnement des survivantes.

Formation des acteurs

Pendant trois jours, du 20 au 22 août 2021, sous la houlette de la Direction régionale à l’Action Sociale à Akjoujt, les 15 membres de la Plateforme multisectorielle de lutte contre les VBG, qui regroupe des représentants du Ministère de l’Education Nationale, des Affaires Islamiques, de la Justice, de la Santé, des forces de sécurité (Police, Gendarmerie, Garde), de la commune, ainsi que plusieurs organisations de la société civile, ont suivi plusieurs communications au cours d’une formation de renforcement de capacités.

Vue partielle de la salle lors de l’ouverture – Crédit Aidara

Ils ont été édifiés, en tant que point focal de leur structure au sein de la plateforme, sur le rôle qu’ils doivent jouer en tant que cadre de coordination, de mobilisation de ressources, de sensibilisation de la communauté pour un changement social et de comportement, de référencement et de contre-référencement, de collecte de données, de productions de rapports et de suivi des cas de violences. Outre les réunions mensuelles, les membres de la plateforme doivent également faire le point une fois par trimestre.

Beaucoup de notions leur ont été transmises, comme le concept de VBG, les quatre principes directeurs (sécurité, confidentialité, respect de la dignité des survivants et non-discrimination), la prise en charge psychosociale et médicale des survivants.

Le denier jour, les participants se sont scindés en deux groupes de travail sur deux thèmes : la prise en charge psychosociale et la prise en charge clinique des survivants des VBG.

A rappeler que c’est le mercredi 21 avril 2021 que le Secrétaire général du MASEF et le Représentant résident de l’UNFPA avaient lancé la mise en place des plateformes multisectorielles de lutte contre les VBG dans les quinze Wilayas du pays en commençant par l’équipement des trois Wilayas de Nouakchott.

Ces plateformes sont composées de 15 unités informatiques complètes, 15 imprimantes laser, 15 armoires de rangement, 300 chaises visiteurs, 15 multiprises 10 mètres, 30 onduleurs, 15 cartons rame de papier, 30 recharges imprimantes, 30 produits hygiène, plus un lot d’eau de javel et de détergent, ainsi que 45 classeurs chemises.

Cheikh Aïdara

Témoignages

Mohamed Ali Ould El Boukhari, Directeur régional des Affaires Islamiques

« Cette plateforme est importante si elle va jouer son rôle dans le rétablissement de la justice, comme le veut l’Islam qui bannit toute forme d’injustice. Quelle que soit la victime, homme, femme ou jeune fille. En tant qu’imam, j’ai réglé beaucoup de problèmes de violences, certaines conjugales, d’autres relatifs à des agressions sexuelles. En tant qu’ancien directeur du secondaire, je sais qu’il y a beaucoup d’abus en milieu scolaire. Il faut surtout retenir que la ville d’Akjoujt, en sa qualité de cité industrielle, est un carrefour qui attire beaucoup de monde, des gens venant de toutes les régions du pays et de l’étranger, avec la présence de stupéfiants. On y compte beaucoup de crimes sexuels. Les agressions sexuelles ont cependant beaucoup diminué, mais nous comptons cependant, un à deux cas par semaine devant les juridictions. D’où l’importance d’un mécanisme de coordination comme la plateforme qui vient d’être mise en place ».

Oumoukelthoum Hamady NGaïdé, ONG « Assistance aux démunis »

« Nous faisons face chaque jour à toutes les formes de violence. Le dernier cas que nous avons accompagné est celle d’une jeune fille de 15 ans, violée par un cambrioleur. Son agresseur croupit actuellement en prison. L’autre cas, celle d’une femme mariée d’une trentaine d’année, qui a subi elle aussi une agression dans les jardins. L’auteur du viol est quelqu’un de connu. Le cas de cette femme a été aussi pris en charge par notre ONG et l’auteur a été incarcéré. Pour vous dire l’importance de la plateforme car Akjoujt est une ville très dangereuse pour les femmes et les filles. Une vingtaine d’élèves ont ainsi été enceintée. La situation est explosive. Nous fondons beaucoup d’espoir sur la plateforme, car l’essentiel de sa mission doit porter sur la sensibilisation, surtout en milieu scolaire ».

Bâ Zeynabou, Sage-femme, Chef de service santé reproductive au Centre de santé d’Akjoujt

« Avec la drogue et la délinquance juvénile, nous sommes souvent confrontés aux cas de viol et d’agressions sexuelles. Cette plateforme peut beaucoup apporter à la lutte contre les violences, d’autant qu’elle regroupe tous les acteurs impliqués dans la lutte contre ce phénomène. Les autorités ont toujours réagi rapidement à cette situation, et l’apport de la plateforme sera cruciale pour apporter une plus-value à l’offensive contre le fléau des violences qui, il faut le dire, ont pris parfois des ampleurs démesurées à Akjoujt ».

El Mami Ould Brahim, président de la Plateforme de la Société Civile dans la Wilaya de l’Inchiri

« En tant que participant à cet atelier, représentant la Plateforme régionale de la société civile mise récemment en place par le Commissariat aux Droits de l’homme, nous ne pouvons que nous féliciter de l’installation de cette plateforme multisectorielle de lutte contre les VBG qui est venue à point nommé pour mettre fin à ces crimes contre les femmes et les filles. Au niveau de la région, nous ferons en sorte que ce phénomène perde de l’ampleur. Nous suivrons les cas que l’on signalera et nous ferons tout notre possible pour accompagner les survivants et prendre leur cas en charge. Je connais chacun des quinze membres de la plateforme et je confirme que les personnes qui ont été choisies font partie des meilleurs dans leur secteur d’activités, ce qui me pousse à accorder beaucoup de confiance au travail qui sera abattu dans ce domaine ».

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