Entretien avec Alama Walet Elmehdi : « Tout ce que j’ai entrepris n’est rien d’autre que le fruit de mes projets »

Article : Entretien avec Alama Walet Elmehdi : « Tout ce que j’ai entrepris n’est rien d’autre que le fruit de mes projets »
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28 février 2022

Entretien avec Alama Walet Elmehdi : « Tout ce que j’ai entrepris n’est rien d’autre que le fruit de mes projets »

Touarègue de la tribu des Kel Ansar, Allama est native de Kati dans le Koulikoro où elle a grandi.  Elle est originaire de la région de Tombouctou au Mali. A 22 ans, cette jeune réfugiée malienne a fondé sa propre entreprise à Nouakchott dans le domaine médical et pharmaceutique. Entretien mené par Boubakrine Sidi, collaborateur du blog.

Mme Allama Walet El Mehdi – Crédit Aidara

En 2012, suite aux évènements douloureux au Mali, Mme Allama s’installe chez un oncle à Nouakchott. Là, elle entame ses études de médecine et débute une carrière de cheffe d’entreprise.

Aujourd’hui, cette jeune dame, est en 7e année de médecine et PDG de ProPhaMeDis, une entreprise spécialisée dans la distribution et la promotion de produits pharmaceutiques et dermo-cosmétiques en Afrique francophone.

Médecin de formation, Mme Allama Walet El Mehdi a en poche une maîtrise en biotechnologie et en économie de santé de l’université PompeuFabra de Barcelone qu’elle a décroché en 2021.

Avec son double cursus de formation médecine-biotechnologie, elle monte son entreprise qui vise à représenter les laboratoires pharmaceutiques et parapharmaceutiques en Afrique de l’ouest à partir de la Mauritanie.

Aujourd’hui son entreprise, ProPhaMeDis, compte plus d’une cinquantaine de collaborateurs.

Connue pour ses sacrifices, sa discrétion, sa modestie et son esprit d’entreprise et d’entrepreneuriat, Allama, conjugue les études avec les affaires.

Entretien…….

Quel est le secret de votre choix sur la Mauritanie pour continuer vos études et lancer votre projet ?

Mme Allama : (Rires). Je l’ai choisi d’abord parce que c’est mon pays d’accueil, c’est le pays où j’ai trouvé refuge après les événements tragiques qu’ont traversé ma famille et moi en 2012. C’est là, où je réside et poursuis mes études. Mes plus beaux et marquants secrets sont que nous avons trouvé un pays d’hospitalité, une administration organisée et un peuple d’une générosité rare.  Aussi, le bonheur de travailler avec des équipes expérimentées, me réconforte bien.

Réfugiée et étudiante en médecine à l’âge de 22 ans, comment avez-vous pu vous lancer dans ce secteur si difficile ? 

Croyez-moi, ce fait a été facilité par mon vécu. En effet, depuis 2012, le chemin de toutes les opportunités s’est frayé devant moi. Tout ce que j’ai entrepris n’est rien d’autre que le fruit de mes projets que j’ai dessinés depuis l’obtention de mon baccalauréat au Mali. J’avais porté mon premier choix sur la médecine biotechnologique.

Permettez-moi de dire que je n’ai pas accepté que la guerre brise mes rêves et le destin était là. « Les événements nous rendent plus forts, il ne faut pas se laisser abattre », m’avait dit mon père.

Des difficultés vous en avez connues ?

Tout à fait ! J’en ai connu au début, mais, j’ai fixé le bien-être comme priorité. Naturellement, tout chemin de la vie est parsemé d’embuches synonymes de difficultés.

Mais sur mon trajet, j’ai eu la chance de rencontrer des personnes extraordinaires qui tenaient à ma réussite. Je peux parler de mes collaborateurs Mauritaniens qui ont été compréhensifs pour le lancement et le développement de mes affaires.

Je souligne ici que seul l’accès à un accompagnement financier m’était difficile mais cette étape a été franchi. Raison pour laquelle ProPhaMeDis a toujours fonctionné avec mes propres fonds.

Je peux dire que j’ai vite compris qu’en étant une jeune fille (22 ans), réfugiée et étudiante en 2e année de médecine, mon profil n’était pas du tout attirant et très loin d’être convaincant. Ca, j’’en étais consciente. Du coup, j’ai décidé de ne pas me hasarder à chercher et j’ai réfléchi à d’autres options qui m’ont servies à arriver au stade où j’en suis aujourd’hui.

Vous avez parlé de collaborateurs mauritaniens qui ont participé à la réussite de votre projet. Pouvez-vous nous en parler ?

Absolument ! Les équipes ProPhaMeDis, Laborex Mauritanie, Groupe Chinguitty Pharma, les professionnels de la santé, les autorités mauritaniennes etc.… Et tant d‘autres, ils ont tous en grande majorité accepté mon projet. D’ailleurs, je les remercie pour les conseils qui me vont droit au cœur et leurs orientations qui sont d’une part le secret de la réussite de ce projet.

A ce niveau, j’admets que même si je sais que j’aurais pu faire davantage et être meilleure que celle que je suis aujourd’hui, je reste satisfaite de mes réalisations et je ne décroitrai pas avec la volonté d’Allah.

Quel sera l’avenir de ProPhaMeDis ? Comptez-vous rejoindre votre famille ou rentrer au pays un jour ?

S’agissant de ProPhaMeDis, je vois que son avenir sera meilleur qu’aujourd’hui, Inchallah. Rejoindre définitivement mes parents, là, où ils se trouvent et rentrer au pays ? Après tout je considère qu’ici c’est chez moi, je me sens chez moi et je continuerai sans cesse de développer mes activités en Mauritanie et à partir de la Mauritanie. Je précise que depuis la Mauritanie je rends visite régulièrement à mes parents comme je l’ai toujours fait.

Un message à vos compatriotes victimes de guerre et devenues réfugiées à travers le monde ?

Mon message à mes sœurs et proches qui ont vécu le mal et quitté le pays par contrainte, je leur dis ne jamais désespérer, ni d’abandonner leurs rêves et leurs projets face à des situations comme la nôtre.

Les meilleurs moyens pour vivre la paix sont le savoir, la sagesse et le fait d’accepter son destin. Nous devons savoir que le fait d’avoir survécu déjà à la guerre et l’instabilité démontre notre capacité de pouvoir réellement évoluer dans notre vie.

Boubakrine SIDI

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