Hodh Echarghi, dysfonctionnement de l’Etat de droit et abus des normes administratives

16 mars 2022

Hodh Echarghi, dysfonctionnement de l’Etat de droit et abus des normes administratives

La région du Hodh Echarghi est aujourd’hui sous les rampes de l’actualité sous son plus sombre aspect.  Au refus d’un ex-wali, accusé d’avoir fait sombrer l’usine de lait de Néma avec la complicité de certains lobbies affairistes, s’ajoute un coup fatal porté à la hiérarchie des sources de droit et au principe de non accumulation de fonctions jugées incompatibles.

Usine de lait de Néma

A 1.200 kilomètres de Nouakchott, aux lisières d’un état malien au bord de la déconfiture, se joue une des plus mauvaises pièces de l’administration mauritanienne. Depuis quand un Wali quitte ses fonctions et décide de rester sur place pour amputer à son remplaçant le volet lié au développement dont il assure la coordination. Le Ministre de l’Intérieur l’a confirmé lors de son passage dans la région le lundi 14 mars dernier en compagnie des principaux chefs de l’armée pour partager la compassion du gouvernement avec les populations riveraines du Mali suite à la disparition de plusieurs ressortissants.

Pire, le Wali sortant cumule déjà ces deux fonctions avant même l’arrivée de son remplaçant. Plus incompréhensible encore, le fait que ce même Wali ait été depuis longtemps Président de conseil d’administration de l’usine de lait aujourd’hui au bord de la faillite. Depuis quand un Wali peut présider un conseil d’administration d’une société dans sa propre région ?

Selon Beiby Cheikh Idoumou, ancien diplomate originaire du Hodh Echarghi et qui anime une plateforme dénommée « Ma Patrie », l’usine de lait de Néma est aujourd’hui en arrêt complet à cause d’impayés et de dysfonctionnements internes.

Selon d’autres observateurs, cette panne qui touche l’une des infrastructures les plus importantes du pays, financé à coût de plusieurs milliards d’ouguiyas avec l’appui de l’Union européenne, est la énième victime de la mauvaise gestion. Beaucoup accusent certaines officines affairistes d’être derrière les hécatombes qui ont décimé l’industrie mauritanienne, rappelant les tristes sorts de plusieurs unités de pêche à Nouadhibou, notamment la société mauritano-espagnole, IMAPEC, la MAFCO et la SOFRFIMA, mais aussi dans le domaine de la transformation du fer, la SAFA. Le domaine agricole ne fut pas en reste, selon eux, citant le sort des milliards dilapidés du Crédit Agricole.

Ces hommes d’affaires qui ont bâti leur fortune sur l’import-export verraient ainsi d’un mauvais œil un développement industriel qui les priverait de leur business. Pour ces observateurs, ce lobby ne baissera pas les bras tant qu’il n’enterrera pas l’usine de lait de Néma comme il a enterré les usines qui l’ont précédé au détriment de l’autosuffisance alimentaire du pays. Or, selon eux, la Mauritanie qui a eu du mal à contenir les impacts de la pandémie Covid-19 est confrontée aujourd’hui à une crise russo-ukrainienne dont les retombées s’annoncent fatales sur l’économie mondiale et les conditions de vie des populations, notamment dans les pays pauvres.   

Le site d’information L’Eclairage (http://www.leclairage.info/index.php/fr/politique-2/3164-h-charghi-deux-walis-pour-une-region-qu-est-ce-qui-reste-a-passer-au-nouveau-wali) dans la couverture de la situation titre : « Hodh Charghi, deux Walis pour une région, qu’est-ce qui reste à passer au nouveau Wali ? » parlant de l’accaparement du Wali sortant du volet développement de la région. Il s’agit en fait de savoir, est-ce qu’un Wali sortant, devenu Coordinateur d’un pool de développement nommé par note de service dans la région qu’il dirigeait, est plus fort qu’un Wali nommé par décret pris en conseil des ministres ? Autrement dit, est-ce qu’un Wali peut accepter qu’on lui impute la part la plus importante de ses prérogatives, à savoir le volet développement ?

Certains lient le choix de l’ancien Wali à rester dans la région et à contrôler son volet développement, à l’impératif de couvrir sa gestion catastrophique de l’usine de lait dont il assurait la présidence du conseil d’administration. Il jouirait de l’appui d’un puissant lobby.

Cheikh Aïdara

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