Braquage de la BMCI : un rude coup pour la confiance bancaire en Mauritanie

Article : Braquage de la BMCI : un rude coup pour la confiance bancaire en Mauritanie
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9 avril 2017

Braquage de la BMCI : un rude coup pour la confiance bancaire en Mauritanie

Les Mauritaniens sont déjà frileux par rapport aux banques, d’où le faible taux de bancarisation et le fort taux de thésaurisation. Le braquage vendredi passé de la BMCI risque d’emporter le peu de confiance qui reste à la clientèle.

Attroupement devant l’agence dévalisée quelques minutes après

Jamais pays, autre que la Mauritanie, n’offre aussi facilement sa richesse sur un plateau d’argent au premier lascar de passage. L’image de clients sortant des banques les bras lestés de magots est devenue presque banale. Que dire des agences solitaires, jetées qui dans des rues étroites et obscures, qui dans des no man’s land, avec comme seuls outils de surveillance, de vieux gardiens souvent en somnolence ou de fantomatiques réseaux de surveillance obsolète, si ce n’est un personnel sans aucune connaissance des règles les plus élémentaires de la sécurité.

Le braquage vendredi dernier, en pleine journée, de l’agence de la BMCI (Banque mauritanienne pour le commerce et l’industrie) à Tevragh-Zeina, près des Galeries TATA, illustre parfaitement, cette insouciance toute mauritanienne des mesures de sécurité. Il a fallu pour les quatre assaillants peu d’efforts, pour débarquer puis repartir avec la bagatelle de 121 millions d’UM. En dix minutes. Devant l’agence complètement dégarnie dans sa façade extérieure, les assaillants ont ainsi pu débrancher tranquillement le groupe électrogène, faire sauter le courant électrique, rendre aveugle les caméras de surveillance, ligoter le seul agent de sécurité présent sur les lieux avant de braquer le reste du personnel avec des armes. La police n’a été informée de l’incident que plusieurs minutes après le départ des braqueurs.

Pour le moment, le professionnalisme de la police mauritanienne a permis de mettre la main sur les auteurs présumés du braquage moins de quarante-huit heures après les faits. La bande suspecte est dirigée par un multirécidiviste répondant au surnom de Govinda, libéré il y a juste six jours de prison.

Mais nos banques qui sont en réalité mal protégées en Mauritanie, ne doivent pas toujours compter sur la dextérité de la police, car un jour, ce genre de coup pourrait être mené par de véritables professionnels ! Il faut dire que dans le cas de la BMCI, les assaillants ont procédé exactement comme dans les films américains dans les règles de l’art hollywoodien. Une opération parfaitement chronométrée, bien étudiée. Certains évoquent déjà une éventuelle complicité interne, car pour connaître le nombre de caméras et le système de désactivation, il faudrait avoir eu beaucoup de renseignements.

L’affaire est prise trop au sérieux par le Ministère de l’Intérieur et les forces de sécurité, car rien pour le moment ne permet de dissocier l’acte de la BMCI à une opération terroriste en préparation, exactement comme cela s’était passé avec le fourgon du Port de Nouakchott il y a quelques années. Ce vol a été suivi quelques jours plus tard par la fameuse opération du Centre Emetteur.

Rien ne dit que pour le cas de la BMCI, les assaillants n’ont pas d’accointance avec une organisation terroriste, surtout qu’ils étaient masqués et détenaient des armes de guerre, kalachnikov, Mozzer, etc.

C’est pourquoi, plusieurs spécialistes des questions sécuritaires recommandent déjà au Ministère de l’Intérieur de s’impliquer davantage dans les dispositifs de sécurité des banques et de leurs agences. Jusque-là, cette question était laissée à la discrétion des banquiers qui, pour minimiser cet aspect, ne dépensaient pas trop pour protéger leurs institutions. Il faut dire que les assureurs doivent à présent se poser des questions sur les risques qu’une telle situation pourrait leur coûter.

Il faudrait que la Mauritanie s’imprègne des expériences des autres pays, comme le Maroc où le Ministère de l’Intérieur et l’association des banquiers avec la Banque centrale ont signé une convention définissant les moyens et mesures de sécurité minimales à mettre inévitablement en œuvre.

Toutes les agences bancaires situées dans les grandes villes doivent placer des systèmes d’alarme et de vidéosurveillance adaptés et installer des vigiles devant chaque portail d’agence. Toutes les banques devront se conformer à ce dispositif. Le choix des vigiles est aussi important. Ils ne doivent pas avoir moins de 24 ans. Physiquement, ils ne doivent pas être petits, minces ou porter des lunettes. Ils doivent jouir d’une bonne moralité, avec un casier judiciaire vierge  et bénéficier d’un bon salaire. De préférence, avoir déjà fait l’armée ou une force de sécurité avec un certificat de bonne conduite.

Hélas, la plupart des vigiles dans les banques en Mauritanie ne répondent pas à ces critères. Il s’agit en général de vieillards ayant dépassé l’âge de la retraite, chétif, à demie-aveugles, sans force physique, souvent sans matraque ni arme pour se défendre.

Mais en fait que doit-on s’attendre des vigiles, si l’on sait que comme dans tous les pays, ils n’ont pas droit aux armes. Ils ne peuvent même pas réagir en cas d’attaque, car les instructions qui régissent leur profession les leur interdit. En fait, voilà le message que l’on donne aux vigiles «faites tout ce que l’agresseur vous demande de faire. N’intervenez pas. Essayer seulement de prendre le maximum d’informations sur lui, dévisagez-le ». Oui, mais si le criminel porte une cagoule, comme dans le braquage de la BMCI ?

Chaque agence doit avoir un dispositif d’alarme branché sur le commissariat de police le plus proche, avec de bons caméras bien placés sur les points stratégiques.

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