A Abidjan, les experts au chevet d’un malade nommé Sahel

Article : A Abidjan, les experts au chevet d’un malade nommé Sahel
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20 octobre 2017

A Abidjan, les experts au chevet d’un malade nommé Sahel

Le Sahel est une région malade et misérable, une des régions les plus malades et les plus misérables du monde.

De très nombreuses femmes y meurent chaque année en donnant la vie. Au Sahel, les enfants ont peu de chance de fêter leur cinquième anniversaire. Les jeunes, même diplômés, ont perdu toute illusion : pas de travail et pas de perspective d’avenir (avec la déception d’avoir suivi des études supérieures, pendant plusieurs années, qui ne mènent à rien).
Le Sahel, c’est aussi la région du monde où l’on fait des dizaines d’enfants avec la certitude que la Providence leur ouvrira la voie du succès et qu’Allah se chargera de leur subsistance. En réalité, beaucoup d’entre eux finissent dans la rue, ils deviennent brigands de grands chemins, quand ils ne sont pas récupérés par le premier recruteur de la région, Al Quaïda ou Boko Haram, qui les transforme en torchon ambulant ou en tueur en séries.

Crédit photo : Presse-dz

Au Sahel, plus de la moitié de la population – c’est-à-dire les femmes – est exclue du cycle de production économique. Des analphabètes, on en forme des millions. De simples mères pondeuses, des esclaves sexuelles, tout juste bonnes à faire des enfants dès le plus jeune âge, sans droit au chapitre dans la vie de la cité, y compris pour décider de leur propre sort ou de celui de leurs enfants. On les répudie souvent, vieille dès l’âge de trente ans, un paquet de marmots sur les bras, sans instruction, sans formation et donc sans travail.

Dans les pays du Sahel, qui vivent sous perfusion de la finance mondiale, règne la corruption : détournement des deniers publics, détournement de l’aide internationale et des  prêts préférentiels. Les pays du Sahel creusent ainsi, année après année, des gouffres dans leurs budgets nationaux, hypothéquant l’avenir de plusieurs générations à venir.

Les écoles des pays du Sahel forment des chômeurs analphabètes. Quant aux structures de santé, elles accueillent des malades que l’on détrousse et saigne à mort avant leur séjour à la morgue.

Dans ces pays végètent des élites corrompues, des chefs d’Etat à vie et des dictatures implacables. Ces élites ratifient tout ce qui bouge en matière de traités ou de conventions internationales. Elles affament le peuple, le paupérise et le tient parfois en joue avec des armées républicaines transformées en milices.

Ces élites bien en chair se soignent à l’étranger, loin des hôpitaux mouroirs de leur pays. Elles envoient leurs progénitures dans les plus prestigieuses écoles du monde, loin de leurs écoles à abrutir le petit peuple qui applaudit les réalisations du grand guide éclairé.

Oui, il faut le dire, malheureusement le Sahel en est encore là.

Guerres, famine, maladies, fanatisme, rébellion, contre-rébellion, drogue, prostitution, trafics illicites en tout genre, violences… tout cela fournit chaque jour de la matière à la presse internationale.

Voilà les gros mots, et les gros maux, dont souffre le Sahel.

Le Sahel, ce macchabée que l’on tente de ressusciter depuis des décennies, que ce soit à Abudja, à Nairobi, à Addis-Abeba, à Maputo, à Johannesburg, à Niamey, à Bamako, à Dakar ou encore à Nouakchott, et même à Londres, Paris ou Bruxelles. Que de sommets, que de discussions… En vain.

La rencontre d’Abidjan les 17 et 18 octobre derniers, consacrée à l’engagement des Premières dames des pays membres du SWEDD (Projet d’Autonomisation des femmes et du dividende démographique au Sahel), après les engagements non tenus de leurs maris, n’est que la toute dernière intervention du médecin avant la mort, une énième tentative de venir au secours de peuples dont le plus grand malheur vient de leurs dirigeants.

Cheikh Aidara

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