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Mauritanie : 5ème édition du Woman International Day, une clôture dans la sobriété

Initié par l’Association culturelle « Assalamalekum » présidée par M. Limam Kane Monza, et mené de main de fer par Mme Rosita Hawa Bâ, le festival Woman International Day a baissé les rideaux sur sa 5ème édition, ce 8 mars 2024 au Stade Olympique de Nouakchott.

Photo de groupe après le lancement du Woman Day – Crédit Aidara

C’est au marché créatif, formé de stands où exposent depuis plus d’une semaine plusieurs femmes venues de divers pays de la sous-région et situé à l’intérieur du stade Olympique de Nouakchott, que s’est déroulée la clôture du Woman International Day.

Le marché créatif

Le marché créatif du Woman Day a connu une grande affluence. Plusieurs personnalités s’y sont promenées. Des processions d’étals bien achalandés où s’entassent « thiourayes », « niamatos », vêtements, produits de la médecine traditionnelle, venus du Sénégal, Mali, Guinée, Niger, entre autres pays Parmi les distingués hôtes qui ont visité le marché, l’ambassadrice des Etats-Unis d’Amérique en Mauritanie, Son Excellence Madame Cynthia Kirscht.

Le marché créatif du Woman Day au Stade Olympique – Crédit Aidara

La cérémonie de clôture, bien qu’organisée avec sobriété, a été marquée par un bref speech prononcé par la directrice du festival, Mme Rosita Hawa Bâ, qui a distingué au cours de la soirée plusieurs femmes qui se sont illustrées par leur combat. Ainsi, ce 8 mars 2024, journée internationale des droits des femmes, célébrée en grande pompe en Mauritanie, a coïncidé avec le clou d’un festival qui a ponctué pendant huit jours la vie culturelle, artistique et socioprofessionnelle des Mauritaniens. Le concert prévu dans la soirée a été annulé suite à l’insécurité qui avait marqué le dernier show organisé au stade.

Rosita Hawa Bâ en selfie avec Cynthia Kirscht (avec accord pour publication)

Sous le thème « Refus de confinement aux tâches domestiques », le marché créatif avait jeté depuis le 1er mars 2024 ses chapiteaux au cœur du stade Olympique, guidé par un objectif, l’autonomisation des femmes. Celles-ci ont exposé pendant toute la durée du festival leur savoir-faire et leurs produits tout droit sortis de leur créativité.

Ouverture officielle du festival

Il faut dire que le festival Woman International Day avait lancé le 1er mars 2024 sa 5ème édition au Palais des Congrès de Nouakchott en présence de la présidente de la Région, Mme Fatimetou Abdel Maleck, du corps diplomatique, des activistes de la société civile et le gotha du monde culturel, artistique et sportif du pays.

Mme Oumou Kane et M. Limam Kane Monza – Crédit Aidara

Une dizaine de figures féminines ont été honorées au cours de la cérémonie, des pionnières dans les domaines de la santé, de l’économie, du droit, de la politique, du sport et de la vie sociale. Parmi les lauréates, la présidente du Conseil mauritanien des femmes d’affaires, Mme Fatima Sidi Mohamed El Vil, pour l’entrepreneuriat féminin, Mme Oumou Kane, responsable du football féminin au sein de la Fédération mauritanienne de football (FFRIM), Mme Zeynabou Taleb Moussa, présidente de l’Association Mauritanienne pour la Santé de la Mère et de l’Enfant (AMSME).

Formations, concerts, débats

Pendant ce festival, qui a été soutenu par plusieurs partenaires, dont la Caisse Nationale d’Assurance et de Solidarité en Santé (CNASS), plusieurs ateliers de formation ont été initiés, notamment dans le domaine de l’agriculture urbaine avec le concours de deux expertes en la matière, Louise Tanchon et Andréa Pasqualini, toutes deux ingénieurs agronomes.

Affiche du 1er concert du Woman Day 2024 / ifmauritanie via Instagram

Il y a eu également une formation en gestion de projet, avec un point essentiel sur la stratégie d’entreprise SWOT. Le festival a connu également plusieurs conférences-débat sur des thèmes variés, « nouvelle loi pour les droits des femmes en Mauritanie », « importance de l’autonomisation économique de la femme », « excision », etc.

Le public a eu aussi droit à des concerts, avec des artistes de renommée comme cette belle soirée animée à l’Institut français de Maurtianie par Noura Mint Seymali et Miss Haga, ou encore cette soirée enflammée au stade Olympique avec Youpi, ou bien encore cette soirée acoustique avec Teacher Sarr à la Mairie de Tevragh-Zeina.

Le festival a été aussi marqué par la mise en place du réseautage des femmes entrepreneuses et créatives, la projection d’un film de Hawa Bâ sur les violences basées sur le genre, un défilé de mode, des matchs de football…

Cheikh Aïdara


Lancement de « Usine Digitale Mauritanie », le numérique pour raccourcir les voies du succès

Après le Bénin, le Gabon, et bientôt la Côte d’Ivoire, la Mauritanie a lancé mercredi 6 mars 2024 la troisième succursale de « Usine Digitale », dont la cellule mère basée à Dakar avait initié cette technologie il y a de cela 8 ans, impulsant cette extraordinaire révolution dans le monde de la communication et de l’entreprenariat en Afrique.

Vue partielle des participants – Crédit Aidara

Il y avait du beau monde, ce mercredi 6 mars 2024, au siège de « Usine Digitale Mauritanie » qui venait de lancer les activités d’une nouvelle structure dans le monde digital mauritanien. Des partenaires, le milieu de la presse et des hommes d’affaires.

Un nouvel acteur dans le monde digital

@aidara

Prenant la parole à cette occasion, Fatimata Abdallahi Lam, Directrice de « Usine Digitale Mauritanie » a déclaré qu’au niveau de sa structure, ils croient fermement que la clé du succès réside dans la capacité à exploiter la dynamique du monde digital pour créer de la valeur ajoutée.

« Nous mettons notre engagement et notre expérience acquise au sein de nos agences de la sous-région à votre service » a-t-elle précisé. Selon elle, « chez nous, à Usine Digitale, chaque client est unique et chaque activité, une nouvelle aventure ». Elle a souligné par ailleurs que « Usine Digitale » deviendra un acteur majeur dans le système digital mauritanien et un partenaire de confiance pour ceux qui aspirent à l’excellence et à l’innovation.

Un partenaire de confiance

@aidara

A son tour, Aminata NDoye, partenaire et collaboratrice dans le projet, a remercié l’assistance à l’occasion du lancement de cette agence de communication digitale.

« Nous avons travaillé dur pour mettre en place une équipe talentueuse et passionnée prête à relever tous les défis qui se présentent à elle » a-t-elle souligné.

Elle a ajouté que dans un monde où la communication numérique est devenue incontournable, « notre agence se positionne comme un partenaire de confiance pour vous accompagner dans la mise en place de stratégies efficaces et innovantes ». Que ce soit d’après elle, « pour la gestion de vos réseaux sociaux, la création de contenu digital, la mise en place de campagnes publicitaires en ligne, ou encore le référencement de vos Web, nous mettons à votre disposition notre expertise et notre créativité.

Retourner au bercail pour offrir son expertise

@aidara

Le partenaire de l’agence, Hassane Met’Hat, devait de son côté se féliciter du lancement d’une nouvelle ère dans le monde du numérique en Mauritanie. « Nous sommes fiers d’annoncer notre partenariat avec « Usine Digitale », une agence de renom au Sénégal. Nous sommes déterminés à repousser les limites du possible et à ouvrir de nouvelles voies vers le succès pour nos clients » a-t-il ajouté.

Il a rappelé être spécialiste du marketing digital et d’avoir l’honneur de participer à cette belle initiative, mais surtout de partager un moment personnel qui illustre son engagement. Il s’agit, selon lui, du sacrifice qu’il a consenti lorsqu’il fut appelé à rejoindre l’équipe, alors qu’il était confortablement installé à Dakar, décidant ainsi de rentrer au pays, de lui apporter son savoir-faire et de participer à son développement économique et social.

Des solutions adaptées et personnalisées

@aidara

Clôturant la liste des intervenants, Moulaye Sall, Directeur Général de « Usine Digital Dakar » et l’un des fondateurs du principe lancé en 2016 au Sénégal, a souligné qu’ils ne viennent pas avec une formule toute prête pour permettre un boom dans le digital, mais que « Usine Digitale », c’est un dialogue,  une discussion et des échanges entre une équipe d’experts du digital à l’écoute d’un entrepreneur, d’une institution, d’un particulier, comme la jeune femme qui a son salon de coiffure et à qui on explique comment faciliter certains process pour développer ses affaires. A chaque client, sa solution digitale adaptée à ses besoins.

Il a précisé que c’est ça l’esprit de « Usine Digitale » qu’ils sont en train de développer en Afrique, au Bénin, au Gabon, et bientôt en Côte d’Ivoire. Il a brossé son parcours et cité certains partenaires déjà conquis par la formule, comme le ministère des Finances du Sénégal, et d’autres géants comme Teylium, BP Prod, Sebamed, etc.

La Directrice de UD Mauritanie au premier plan avec un foulard- Crédit Aidara

Une gamme de produits

Les participants ont suivi par la suite une projection sur les divers produits et services offerts par « Usine Digitale Mauritanie », en particulier UD (Usine Digitale), ID (Identité Digitale) et FA (Freelance Africa), en plus d’une gamme d’autres services comme la stratégie de communication digitale, la conception de site web, la gestion des réseaux sociaux, la création visuelle, le Design, la création de carte visite NFC, le référencement, etc.

Cheikh Aïdara


Birame Dah Abeid : « voilà pourquoi je ne peux pas annoncer ma candidature « 

Au cours d’une conférence de presse animée lundi 4 mars 2024 à l’ilot K de Nouakchott, siège du mouvement abolitionniste IRA qu’il préside, le député Birame Dah Abeid est revenu sur plusieurs points d’actualité, notamment la réunion d’une délégation du FMI avec l’opposition qui a eu lieu le même jour, mais aussi la présidentielle de 2024, l’enrôlement biométrique et des sujets divers.

Birame en conférence, à sa droite Marième Cheikh et à sa gauche Oumar Ould Yali – @Cheikh Aidara

Plusieurs sujets d’actualité ont été abordés par le député et président du mouvement IRA, Birame Dah Abeid au cours d’une conférence de presse le 4 mars 2024 à Nouakchott. Devant un parterre de journalistes, il a fait le point sur la rencontre entre quelques représentants de l’opposition, un émissaire du FMI venu de Washington et la représentante de l’institution monétaire internationale en Mauritanie, Anta NDoye. Il a aussi parlé de la présidentielle en vue, de l’état-civil et d’autres sujets soulevés par les journalistes. Etaient présents à ses côtés, Oumar Ould Yali, président du parti RAG (non reconnu), l’aile politique d’IRA, et la député Marième Cheikh Dieng.

Rencontre avec le FMI

Faisant l’économie de la rencontre avec le FMI, Birame Dah Abeid a expliqué que l’objectif de la rencontre entre la mission du FMI et les leaders politiques invités, tels que présentée par l’émissaire de Washington, est de recueillir l’avis de la classe politique par rapport aux interventions en Mauritanie de l’institution monétaire et le bilan qu’ils en font, ainsi que ses répercussions sur les conditions de vie de la population. Cette pratique entrerait, selon lui, dans la routine du FMI au niveau des pays membres, à la veille de chaque élection présidentielle.

Selon Birame, l’opposition aurait déclaré que les interventions du FMI en Mauritanie n’ont aucune incidence sur la vie des population. Ils auraient mis en exergue la dégradation de l’éducation marquée par les faibles résultats du baccalauréat, la falsification des diplômes, le népotisme et la corruption. Idem sur le plan de la santé, avec la prolifération des médicaments falsifiés, le faible niveau de l’offre médical, le chômage des médecins sortants et des autres diplômés de la santé.

Les partis présents à la rencontre auraient également cité la hausse vertigineuse des prix du fait d’une politique usurière pratiquée par l’Etat à travers la forte taxation des produits de première nécessité, la fraude fiscale pratiquée par les grosses fortunes, la mal gouvernance financière, l’enrichissement illicite des cercles proches du pouvoir, la création par l’Etat d’une clientèle de nouveaux riches au sein des cellules qui lui sont affiliées. En d’autres termes, les responsables de l’opposition auraient mis en exergue la forte discrimination en termes de partage de la richesse nationale, ce qui met en rade une importante partie de la population sur une base ethnique et raciale.

A été également évoquée la question du chômage, surtout celui des jeunes, mais aussi la pauvreté dont les taux augmentent au lieu de baisser.

L’enrôlement et Taazour

Selon Birame, la mission du FMI a déclaré l’importance qu’elle attache à l’enrôlement de tous les citoyens mauritaniens ainsi qu’aux actions de l’Agence de Solidarité Taazour pour son rôle en matière de bien-être social des populations, notamment les plus démunies.

Sur ce point, l’opposition aurait relevé le fait paradoxal en Mauritanie où les citoyens sont à la recherche de leur nationalité comme des étrangers, alors qu’il s’agit d’un droit constitutionnel.  En attestent, selon elle, les longs rangs devant les centres d’état-civil, donnant au visiteur étranger l’impression que ces longues files sont constitués de demandeurs d’asile venus d’ailleurs, alors qu’il s‘agit de Mauritaniens. Selon Birame, c’est comme si l’Etat, à travers le recensement biométrique, chercherait à faire des ciblages dans l’attribution de la nationalité selon l’ethnie et la race. Une discrimination qu’il qualifie de dangereuse.

Quant à Taazour, à travers le registre social établi par le Ministère des Finances, elle ne serait, selon Birame, qu’un instrument politique aux mains du parti au pouvoir pour faire pression en période électorale sur les populations bénéficiaires des aides sociales accordées par l’Etat.

Revenant sur la question de l’enrôlement qu’elle prend en charge en compagnie de deux autres députés, Ghamou Achour et Aminata, Marième Cheikh Dieng a affirmé avoir constaté sur le terrain une volonté politique du pouvoir de refuser l’enrôlement de plusieurs milliers de citoyens mauritaniens, notamment les négro-mauritaniens et les harratines, devenus depuis le 17 février 2024 des apatrides dans leur propre pays. A l’inverse, des Arabes, des Sahraouis et des Touarègues ont été recensés, selon elle.

Clash entre Birame et Ould Maouloud

Birame Dah Abeid est revenu sur le clash qui a eu lieu entre lui et le président de l’UFP, Mohamed Ould Maouloud, au cours de la rencontre des partis d’opposition avec la mission du FMI à Nouakchott. Sur ce point, nous vous livrons la version des deux parties sur l’incident.

Biram et Ould Maouloud – @Aidara (avec IRA)

Version de Birame

Selon Birame, Ould Maouloud a débarqué à l’improviste alors qu’il n’était pas invité, n’étant ni député ni président d’un parti représenté au Parlement. Etaient présents lors de son arrivée, selon lui, les deux fonctionnaires du FMI, en plus de Diop Amadou Tijane, président du FRUD et lui-même. Ils seront rejoints plus tard, probablement après l’incident, par les présidents des partis Sawab et Tawassoul.

Selon Birame, Ould Maouloud aurait salué tout le monde sauf lui, puis prit place. Il se serait ravisé par la suite et lui tendit la main, en lui lançant : « on se salue quand même, même si on va aller en procès ».  Birame aurait refusé de le saluer, arguant qu’il pouvait garder sa main, puis qu’il ne l’a pas salué à son arrivée.

Birame ajoute que Ould Maouloud, s’adressant au chef de mission du FMI et de la représentante de l’institution en Mauritanie, aurait lancé : « celui qui est en face de vous prétend être un défenseur des droits de l’homme, mais en réalité c’est un fauteur de trouble qui cherche à semer la zizanie et la discorde dans le pays ».

Furieux, Birame dit avoir répliqué en le traitant de menteur, ajoutant que Ould Maouloud est en mission commandé par le ministre de l’Intérieur pour le provoquer et créer une bagarre. Et d’ajouter que Ould Maouloud aurait demandé que Birame soit expulsé de la salle, sinon lui il va quitter. Ce à quoi, les responsables du FMI lui aurait répondu qu’ils souhaiteraient bien qu’il reste pour participer aux échanges mais qu’ils ne pouvaient expulser personne, précisant que ce problème est un problème personnel entre lui et Birame et que leur mission est d’écouter leurs avis sur l’objectif de la rencontre. Sur ce, Ould Maouloud serait parti, d’après Birame.

Version de Mohamed Ould Maouloud

Dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux, le président de l’UFP a livré sa version du clash qui l’a opposé à Birame. Selon lui, il a reçu une invitation du Ministère de l’Intérieur pour assister à une réunion convoquée par le FMI adressée à quatre présidents de partis politiques, à savoir l’UFP, Tawassoul, Sawab et FRUD.

A son arrivée dans la salle de réunion qui s’est tenue à la Banque centrale, il trouva les deux représentants du FMI, puis Diop Amadou Tijane et Birame. Il salua tout le monde, y compris Birame. Mais ce dernier aurait refusé sa main tendue, puis lui adressa une volée d’insultes et de diatribes, ne lui laissant aucune possibilité de réplique. Ould Maouloud affirma avoir été profondément gêné par cette attaque agressive d’autant que la scène se déroulait en présence d’une mission étrangère.

Il affirme s’être excusé auprès de la mission du FMI, arguant qu’il ne pouvait pas participer à une rencontre où tant de violences s’est manifestée. Puis, il soutient avoir quitté la salle, suivie par les deux fonctionnaires du FMI, visiblement désolés de ce qui venait de se passer. Ould Maouloud affirme n’avoir à aucun moment demandé que Birame soit expulsé de la salle.

Cet incident, quoiqu’on ne puisse savoir lequel entre Birame et Ould Maouloud est l’agresseur ou l’agressé, a fait le chou gras des réseaux sociaux mauritaniens, où les partisans des deux leaders se sont livrés à des passe-d ’armes truffées d’invectives à travers la toile.

Il faut noter que le torchon brûle entre les deux hommes depuis que Ould Maouloud a porté plainte contre Birame pour diffamation.

Convocation des partis candidats à la reconnaissance

La réunion convoquée par le Ministre de l’Intérieur adressée à tous les partis en quête de reconnaissance officielle a eu lieu lundi 4 mars 2024. Oumar Ould Yali, président du parti RAG dont la demande de reconnaissance bute depuis des années sur le refus des autorités, est revenu sur cette réunion. Selon lui, cette subite envie du Ministre de l’Intérieur de rencontrer les partis en gestation en plus de ceux déjà dissous, est une mascarade et une insulte aux lois de la République. D’après Omar Ould Yali, le régime actuel et celui qui le précède ont gelé depuis des années la loi sur les partis, se substituant à l’Assemblée nationale seul organe de législation, pour suspendre des dispositions légales. En témoigne, cette volonté du Ministre de l’Intérieur de vouloir ressusciter des partis politiques dissous par la force de la loi. En définitive, Oumar Yali trouve dans cette initiative du Ministre de l’Intérieur une intention inavouée de faire reconnaître de nouveaux partis proches de son sérail politique en cherchant à se camoufler derrière la reconnaissance de partis honnis comme le RAG. La réunion à laquelle il avait délégué un membre du parti se serait achevé, selon lui, sur des salamalecks en attendant la prochaine réunion.

De l’élection présidentielle en vue

Birame trouve que c’est la première fois dans l’histoire politique du pays où l’on voit apparaître au sein du pouvoir une puissante aile dont l’objectif est d’empêcher les partis politiques de l’opposition d’être représentés au sein des instances municipales, régionales et législatives. C’est également la première fois, selon lui, qu’une aile puissante émerge au sein du pouvoir pour empêcher que l’opposition puisse aligner aux élections présidentielles des candidats naturellement connus sur la scène politique. Il donne l’exemple des élections générales qui ont eu lieu en 2023 où le ministre de l’Intérieur aurait convoqué certaines personnalités en quête de reconnaissance pour leurs partis en leur disant qu’il ne pouvait pas leur donner un parti car cela l’obligerait à faire de même pour le parti RAG de Birame, ce qu’il ne compte pas faire. C’est ainsi que le Ministre de l’Intérieur aurait dispatché ces personnalités qui ne cherchaient qu’un strapontin pour accéder à un poste électif vers des partis déjà reconnus, certains de la majorité et d’autres de partis soi-disant de l’opposition.  

Birame considère que ces machinations sont une trahison de la volonté populaire et une manière de vider la démocratie et ses institutions de leur substance. Cette même machination serait déclenché ces temps-ci selon lui en prélude à la prochaine présidentielle de 2024. Et cela en connivence avec d’autres forces politiques pour détourner une nouvelle fois la volonté politique en brisant l’élan de la vraie opposition.

C’est cette sourde machination qui l’empêcherait lui Birame d’annoncer sa candidature à la présidentielle de 2024 sachant que l’aile extrémiste du pouvoir cherche à l’écarter de la course à travers le président de l’UFP Mohamed Ould Maouloud et sa plainte pour diffamation.

C’est pourquoi, a-t-il ajouté en substance, l’opposition doit préparer un plan B en s’accordant sur une candidature unique ou tout au moins, autour de trois solides candidats.

Questions diverses

Parmi les autres points abordés, le cas du jeune président du mouvement Kavana, Yacoub Mohamed Lemarabott, objet selon Birame d’une cabale, à travers la publication d’une carte qui attesterait de son statut d’agent des services de renseignement. Selon lui, il considère que ce jeune fait l’objet d’une campagne de dénigrement visant à le porter atteinte à sa crédibilité à cause de son combat contre le système politique dominant et contre ses injustices.

Birame Dah Abeid et Lemrabott de Kavana – @ Aidara (avec IRA)

Birame a aussi parlé de la convention entre l’Union européenne et la Mauritanie sur la migration, soulignant qu’il suit de près ce dossier et qu’il dénoncera toute tentative de rétention et d’emprisonnement de migrants dans des camps conçus à cet effet ou dans les geôles du pays. La migration selon lui n’est pas un crime et le devoir de la Mauritanie est d’expulser ceux parmi les migrants qu’elle ne désire pas accueillir, mais que nul n’a le droit de torturer ou d’enfermer un migrant.

Cheikh Aïdara


Nutrition en Mauritanie, un secteur négligé qui revient dans les priorités

Plus de 120.000 enfants mauritaniens souffrent de malnutrition aigüe modérée (MAM) et plusieurs régions du pays ont dépassé le seuil d’urgence en matière de malnutrition aigüe globale (MAG) et de malnutrition aigüe sévère (MAS). Malgré ces chiffres alarmants, la nutrition a jusqu’ici été le souci mineur des décideurs. A Aleg, un atelier multisectoriel de validation des textes de base sur la nutrition semble remettre la question de la nutrition au cœur des préoccupations du gouvernement.

Vue partielle de la salle – @Aidara

Loin des turbulences de Nouakchott, la ville d’Aleg est en passe de devenir le lieu de « retraites » privilégié pour la réflexion sur les grandes décisions de l’Etat, en remplacement de Tiguint, trop proche de la Capitale et source d’escapades régulières de la part de certains participants aux différents ateliers et séminaires où l’assiduité est sensée être de rigueur.

Ainsi, du 11 au 14 janvier 2024, sous l’égide du Ministère de l’Economie et du Développement Durable, la ville d’Aleg a abrité un atelier de validation des drafts de la Politique Nationale sur la nutrition, ainsi que son plan stratégique multisectoriel. Une trentaine de cadres issus de départements concernés par les questions liées à la nutrition, comme l’Agriculture, l’Elevage, la Pêche, le Commissariat à la Sécurité Alimentaire (CSA) et les Finances y ont pris part, ainsi que certains partenaires comme UNICEF, PAM, Word Vision et la société civile.

Première étape du processus

Il est rappelé que la première étape du processus de révision des documents clés de la nutrition a débuté en 2023 par une rencontre à Tiguint de la Plateforme nationale multisectorielle. Cette étape, sanctionnée par un rapport, a été marquée par l’analyse de la situation de la nutrition au cours de laquelle il a été procédé à la révision de la politique nationale à l’horizon 2030.  Ce qui a permis la révision également du Plan stratégique de nutrition couvrant la période 2024-2030. 

Vue partielle des participants – @Aidara

Ce sont ces deux documents, partagés au préalable au sein de la Plateforme multisectorielle, qui a été l’objet de l’atelier de validation organisé récemment à Aleg.

Après l’ouverture officielle de la rencontre marquée par le mot de bienvenue prononcé par le directeur adjoint de la SCAPP, Sidaty Ould Sidaty, le consultant recruté pour la tâche, en l’occurrence l’ancien ministre de la Santé, Dr. Nedhirou Ould Hamed, a pris la parole pour expliquer les différents volets de l’atelier, axé essentiellement sur les travaux de groupe et les restitutions en plénière.

Trois jours de travaux

Les participants s’étaient scindés en trois groupes de travail dès le premier jour. Ils ont d’abord parcouru les différentes parties de la Politique nationale de nutrition (PNN) au regard de la situation nationale en la matière pour apporter leurs suggestions, avant de faire de même avec le Plan stratégique multisectoriel de la nutrition (PSMN) pour in fine valider les deux documents au regard des améliorations apportées.

Participants – @aidara

Par rapport à la PNN, l’un des groupes a travaillé sur la disponibilité et l’accès des populations à une alimentation nutritive diversifiée et saine, ainsi qu’à une eau potable, à une hygiène et à un assainissement adapté. Le deuxième groupe s’est penché sur la promotion des bonnes pratiques, sur la résilience des ménages face aux crises alimentaires et nutritionnelles, ainsi que la prise en charge adéquate des enfants et des femmes malnutris. Le troisième groupe a travaillé pour sa part sur la bonne gouvernance, les modalités d’opérationnalisation de la PNN, son financement, ainsi que sur le cadre institutionnel de pilotage, de coordination et de suivi-évaluation.

Par rapport au PSMN, les groupes ont travaillé sur les acquis et défis de la réponse nationale, le cadre conjoint de résultat ainsi que l’orientation stratégique en termes de disponibilité et d’accès, de promotion des bonnes pratiques, de renforcement de la résilience et de prise en charge, ainsi que sur la bonne gouvernance et l’environnement propice au développement de la sécurité alimentaire et nutritionnelle.

Financer la nutrition

Toute la problématique de la nutrition repose sur l’absence ou la faiblesse du financement qui lui est accordée. C’est la première rubrique que les départements concernés n’hésitent pas à supprimer en cas de débordement de leurs prévisions budgétaires par rapport aux limites imposées. Il est arrivé même qu’en 2023, la nutrition ait tout simplement été effacée de la loi de finances de cette année.

Participants – @aidara

L’Etat mauritanien semble avoir en effet délégué sa souveraineté alimentaire et nutritionnelle aux agences des Nations Unies et aux organisations internationales. D’où l’indignation que cet état de fait a provoqué lors des plénières. En 2021, un accord tripartite a été pourtant conclu entre TAAZOUR, le Ministère de la Santé et UNICEF.

Malgré son engagement devant les partenaires de payer les intrants nutritionnels à partir de 2023, et malgré les résultats catastrophiques de l’enquête SMART sur la situation nutritionnelle dramatique, le ministère de la Santé a tout simplement refusé de payer les intrants, menaçant ainsi la survie de 30.000 enfants souffrant de MAS. Une décision en porte-à-faux par rapport aux engagements internationaux de la Mauritanie, notamment les ODD 2030, la Feuille de route du mouvement SUN 3.0 et les exigences du N4G de Tokyo, et même sa propre stratégie de croissance pour 2030 (SCAPP).

Participants – @aidara

Aussi, au cours de l’atelier d’Aleg, une journée a été consacrée au renforcement du financement de la nutrition, à la répartition du montant cumulé sur la période entre les priorités stratégiques du PSMN, aux tendances évolutives des besoins financiers en fonction des possibilités de financement, ainsi qu’aux opportunités et contraintes liées au financement de la nutrition.

La tendance serait de porter le budget alloué à la nutrition de 255 millions MRU (à peu près 10 millions de dollars US) en 2022 et 369 millions MRU en 2024, à 3 milliards 117 millions en 2030 (environ 80 millions de dollars US).

Les différents groupes devraient répondre et argumenter les questions liées au financement mobilisé par l’Etat et ses partenaires. Est-il en cohérence avec leurs engagements dans le cadre du mouvement SUN ? La répartition du coût global du PSMN entre les six orientations stratégiques est-elle logique ? La tendance d’évolution du coût annuel estimé du PSMN parait-elle soutenable au regard des possibilités nationales et extérieures de financement ? Quels sont les principales opportunités et contraintes liées au financement de la nutrition ?

A la lumière des résultats des travaux de l’atelier d’Aleg, un plan d’action de la nutrition devrait faire l’objet les jours à venir d’une rencontre nationale à Nouakchott.

Les dividendes de la nutrition

Partocipants – @aidara

La malnutrition a une réelle incidence sur la productivité d’une population, donc sur le développement socioéconomique, culturel et scientifique des Etats. C’est le constat fait par plusieurs experts qui ont tenu à faire la différence entre Indice du Développement Humain (IDH), basé sur la richesse et le PIB, et Indice du Capital Humain (ICH) qui est la valeur totale de la santé, des aptitudes, des connaissances, de l’expérience et des habitudes d’une population et qui est resté longtemps hors- jeu alors qu’il plaide en faveur de la valorisation du capital humain de la prochaine génération. Il est en effet de plus en plus établi, que le désintérêt pour les investissements dans les ressources humaines peut affaiblir radicalement la compétitivité d’un pays dans un monde en mutation rapide dont les économies ont besoin toujours plus de main d’œuvre qualifiée pour maintenir leur croissance.

La nutrition attire des capitaux

La question de la nutrition est devenue si récurrente que des institutions financières telles que la Banque Africaine de Développement (BAD) a engagé un plan multisectoriel qui passe par le renforcement des capacités de ses cadres et responsables dans le domaine de la nutrition, afin de répondre plus efficacement aux fortes demandes que ce secteur commence à susciter, pour ne citer que le Centre de formation en nutrition pour les pays d’Afrique de l’Est et d’Afrique Australe dont le siège est au Burundi, ou encore la priorité donnée à ce sujet par l’Ethiopie qui a institué un Comité interministériel de lutte contre la malnutrition, ou mieux encore, le Centre d’Excellence Régional contre la Faim et la Nutrition (CERFAM) dont le siège est à Abidjan, mais surtout la place de la nutrition en tant que pilier essentiel des Objectifs de développement durable à l’horizon 2030 (ODD 2).

Participants – @aidara

Aujourd’hui, l’accent est ainsi mis sur le tracking budgétaire en matière de nutrition pour garantir l’efficacité et la transparence des dépenses dans le secteur. Ainsi, beaucoup de pays, dont la Mauritanie, disposent d’un plan multisectoriel de nutrition, mais non budgétisé, donc non opérationnel. Mais les fonds étant rares, il est de plus en plus question de fonds innovants ou fonds catalyseurs, comme le « Power of nutrition » ou encore les fonds GFF devenus accessibles à la Mauritanie depuis 2019, mais où la nutrition n’est pas malheureusement inscrite.

Et la compétition est rude, les pays les plus attirants pour les bailleurs étant ceux qui accordent beaucoup plus de ressources domestiques à la nutrition comme le Burkina Faso qui a dégagé un budget de 120 millions de dollars U.S de fonds propres. Ce qui en fait un des pays champions en Afrique de l’Ouest et du Centre en matière de nutrition. Un pays comme le Sénégal est ainsi parvenu lui aussi à décrocher plus de 496 milliards de francs Cfa du GFF pour soutenir son plan de réduction de la mortalité, néonatale, infanto-juvénile, des adolescents et des jeunes (2018-2022).

Il est ainsi recommandé aux Etats d’aligner les financements innovants à leurs plans nationaux multisectoriels de nutrition avec l’appui du point focal, à faire des analyses des dépenses de nutrition, de mobiliser des ressources domestiques, entre autres. Au cœur de ce combat de titan, la multisectorialité de la nutrition qui tarde à se mettre en place dans les pays d’Afrique de l’Ouest, du Centre et Madagascar, ainsi que l’absence dans ces pays de la Couverture santé universelle que l’on continue de saupoudrer sous sa forme déguisée, la couverture médicale universelle qui n’accorde que peu d’intérêt à la prévention, laquelle est au cœur de la lutte contre la malnutrition.

Chiffres sur la nutrition en Mauritanie

Ces chiffres sont issus de l’enquête SMART 2018 de UNICEF et de l’EDS 2019

  • Taux de MAG (moyenne nationale) : 10,9%
  • Wilayas en situation d’urgence (MAG supérieur à 15 / MAS supérieur à 2%) : les deux Hodhs, Assaba, Gorgol, Brakna et Guidimaghha
  • Taux allaitement maternel exclusif : 40,3%
  • Malnutrition aigüe globale (MAG) estimé à 11,6%
  • Retard de croissance : 1 enfant sur 5
  • Taux d’anémie : Trois quart des enfants de moins de 5 ans
  • Carence en vitamine A : près de la moitié des enfants en âge préscolaire
  • Disposition de sel iodé :  moins de 10% des ménages

Cheikh Aïdara
Aleg