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« Libertés publiques, Hausse des prix, Dialogue social », le point de vue de Birame Dah Abeid

Le député Birame Dah Abeid, leader de l’Initiative de Résurgence du mouvement Abolitionniste (IRA), a animé, mardi 19 janvier 2021 à Nouakchott, une conférence de presse au cours de laquelle il est revenu sur plusieurs questions de l’actualité. Il s’agit notamment, de la situation des libertés publiques en Mauritanie, la hausse vertigineuse des prix des denrées de première nécessité et le dialogue sociale en vue.

Birame (en costume) entouré de ses collaborateurs – Crédit Aidara

Birame Dah Abeid, député et président du mouvement IRA, a fait le tour des questions qui préoccupent aujourd’hui l’opinion publique nationale. Il s’agit de la persistante entrave aux libertés publiques, dont celle de manifester (article 10 de la Constitution de la Mauritanie), la hausse vertigineuse des prix des denrées de première nécessité et le dialogue en vue entre les acteurs sociaux. Toutes ces questions ont été abordées au cours d’une conférence de presse qu’il a animée mardi 19 janvier 2021 à Nouakchott.

Loi sur les associations, un actif fort du président Ghazouani

Déclinée en deux points, la situation des libertés publiques en Mauritanie semble particulièrement interpeller Birame Dah Abeid. Il s’est félicité du climat d’ouverture initié par le président Mohamed Cheikh Ghazouani, et ses prédispositions à régler les crises multiformes. L’ancien candidat à la présidentielle de 2019 s’est également félicité de l’adoption par l’Assemblée Nationale, le 11 janvier dernier, de la loi sur les associations (le texte adopté doit être promulgué par le Président de la République et publié au journal officiel avant d’être rendu public). Celle-ci remplace et abroge la loi de 1964, dite aussi loi des autorisations préalables, jugée dictatoriale, antidémocratique et contraire à l’esprit des droits de l’homme.

Le député El Id Mohameden du Rassemblement des Forces Démocratiques (RFD), parti d’opposition, partage le même satisfecit.

https://essahraa.net/fr/html/01152021-1624

« Cette nouvelle loi, basée sur le régime déclaratif est plus conforme à la Constitution et aux principes d’un Etat de droit, car il consacre la liberté d’association et de regroupement » a-t-il précisé. Une transition qui permettra au député d’expliquer son absence des prétoires de l’Assemblée Nationale. Cette loi est, selon lui, le fruit de longues discussions avec Ghazouani. « Pourquoi se mettre en opposition avec le gouvernement et aller à la confrontation dans les allées du Parlement, s’il existe une alternative. C’est-à-dire,. une voie plus pacifique et plus efficace pour obtenir des concessions en faveur des Mauritaniens, en passant par l’oreille attentive du premier décideur du pays » s’est-il défendu.

Il a aussi évoqué les dernières manifestations qui ont secoué Nouakchott ces derniers mois. La plupart ont été durement réprimées par les forces de l’ordre. Il a vivement condamné ces répressions, fustigeant au passage des « fonctionnaires qui n’ont pas encore compris que les réflexes des régimes d’exception sont révolus ». D’après Birame, ces images ternissent les efforts déployés par les autorités actuelles dans leur élan d’apaisement et d’ouverture de la scène politique et sociale.

Il a également reconnu une part de responsabilité de certains manifestants qui ne se seraient pas conformé, selon lui, aux règles de base d’une manifestation pacifique. Et de donner l’exemple du mouvement IRA. Ces membres, a-t-il dit, sont les plus réprimés dans l’histoire de la Mauritanie. Leurs actions ont été également les plus soutenues par la communauté internationale, car conformes aux principes universels des manifestations pacifiques.

Des citoyens livrés au diktat des hommes d’affaires

A entendre Birame Dah Abeid, la Mauritanie serait devenue une jungle où les plus faibles sont laissés à la merci des plus forts. Sans aucun arbitrage de l’Etat et dans l’impunité des gros commerçants. Tous les prix ont doublé, selon Birame, qui note au passage que les ménages mauritaniens n’ont plus le pouvoir d’assurer les repas quotidiens. Une situation exacerbée par un taux de chômage considéré comme l’un des plus élevés au monde.

https://cridem.org/C_Info.php?article=744903

A cela se serait ajoutée l’omnipotence des employeurs, face à la démission de l’administration du travail. A en croire le président du mouvement IRA, les travailleurs mauritaniens sont livrés aux humeurs de leurs patrons. Même les décisions judiciaires en faveur des travailleurs n’ont aucune force d’exécution, selon lui. Il affirme ainsi avoir intercédé plusieurs fois auprès de certains employeurs pour obtenir tout ou une partie de leurs droits. Cette situation a abouti, dit-il en substance, à la décadence des syndicats, brisant ainsi la chaîne de protection du monde productif.

C’est dans ce cadre qu’il a interpellé l’Etat, le président Ghazouani en tête, pour remédier au plus vite à la dérégulation du commerce des produits alimentaires et à la déplorable situation du secteur de l’emploi et du travail. « Pas étonnant dès lors d’assister à l’explosion du cercle de plus en plus élargi des populations démunies et défavorisées. Ce sont elles pourtant qui travaillaient hier dans l’agriculture, l’élevage, la construction de puits, le développement des oasis. Ils se sont trouvés, du jour au lendemain, embarqués dans la galère à cause des injustices sociales » a-t-il déclaré.

Assez de dialogue politique, place au dialogue social

Birame affirme être totalement en phase avec l’intention du président Ghazouani d’engager un dialogue social. Celui-ci touche directement le quotidien des Mauritaniens, d’après lui. . Il souligne que les dialogues politiques successifs qui ont eu lieu en Mauritanie n’ont jamais touché le fond des problèmes auxquels sont confrontés les citoyens. Ils ont été plutôt, dira-t-il en substance, des occasions de marchandages à des profits personnels et des opportunités pour tirer des dividendes politiques individuels.

Des questions comme les conditions de vie des ménages, le chômage, la situation des travailleurs, le partage équitable des richesses, l’unité nationale et la cohésion sociale, l’éducation, la santé, le monde rural, sont plus pertinentes, selon lui. Il reconnaît que certaines questions, comme celles relatives à la Commission électorale nationale indépendante (CENI), au Conseil constitutionnel, au découpage électoral, méritent cependant d’être posées.

Cheikh Aïdara

ENCADRE 1

Les habitants de Hseye Ghabra face au diktat du maire de Néma

Les représentants de Hseye Ghabra. Pr. Khattri (porte-parole) à l’extrême droite – Crédit Aidara

Au cours de la conférence de presse de Birame Dah Abeid, le sort des habitants de Hseye Ghabra, une localité habitée par 18 familles relevant du département de Walata au Hodh Oriental, a été évoqué.

Khattri Ould Ahmed, professeur de Mathématiques et porte-parole des habitants  explique. Selon lui, le maire de Néma, Sidi Mohamed Ould Ahmed Jidou dit Jawda, auquel rien ne les lie administrativement, les empêche de finaliser leur puits. Un ouvrage vital pour subvenir aux besoins en eau potable de la localité.

Fort de son statut de chef traditionnel et d’aristocrate, le maire de Néma jouit, selon lui, de l’appui de l’administration locale, du Wali (gouverneur) au Hakem (préfet), en passant par les chefs de corps et les directeurs des secteurs déconcentrés de l’Etat. La punition qu’il inflige aux habitants de Hseye Ghabra, est d’ordre purement politique, d’après Khattri. En réalité, poursuit-il en substance, l’hostilité du maire s’est manifestée le jour où les habitants de la localité ont décidé de ne plus voter pour lui et de changer de camp politique.

Depuis, ils sont obligés de parcourir des kilomètres par jour pour s’abreuver. A l’en croire, ils ont tapé à toutes les portes et leur dernier recours, c’est le député Birame Dah Abeid. Ce dernier s’est engagé d’après lui, à transmettre leurs doléances et à les accompagner dans leurs démarches auprès des décideurs au niveau central pour réparer l’injustice dont ils sont victimes.

ENCADRE 2

Les partis d’opposition rassemblent leurs forces

Près d’une vingtaine de partis politiques de l’opposition se sont réunis lundi 18 janvier 2021 au domicile de Messaoud Ould Boulkheïr, président de l’Alliance populaire progressiste (APP), figure emblématique de la lutte contre l’esclavage et actuel président du Conseil économique et social.

Messaoud Ould Boulkheïr serait d’ailleurs tombé en disgrâce auprès d’une certaine opinion qui lui reproche ses connivences avec le pouvoir, notamment avec l’ex-président Mohamed Abdel Aziz. Ses détracteurs lui en veulent d’avoir délaissé l’opposition et son combat durant ces dix dernières années en contrepartie de prébendes politiques.

Revenant sur cette rencontre, le vice-président du parti Radical pour une Action Globale (RAG), bras politique du mouvement IRA, Oumar Ould Yali, a donné plus de détail, lors de la conférence de Birame. Il a déclaré que l’opposition s’était réunie après plusieurs mois de léthargie pour rassembler de nouveau ses forces et jeter un regard sur les derniers développements de la scène nationale.

Les échanges qui ont duré selon lui neuf heures d’horloge, de 11heures à 20 heures, ont abouti à la rédaction d’une synthèse. Celle-ci devra être discutée en interne par chaque parti. Une deuxième réunion est prévue pour collecter les recommandations et observations formulées par chaque parti. Le document final consensuel qui en sera tiré, sera transmis, selon lui, au pouvoir en place comme force de proposition.


Examen Périodique Universel (EPU), la Mauritanie passe un 3ème test devant le Comité des droits de l’Homme des Nations des Unies

C’est ce mardi 19 janvier 2021, que la Mauritanie a signé son passage devant les 47 membres du Comité des droits de l’homme des Nations Unies à Genève, à l’occasion du 3èmecycle de l’Examen Périodique Universel (EPU).  

Le Commissaire aux Droits de l’Homme, M. Hacenna Boukhreiss devant le Comité des droits de l’Homme des Nations Unies

A l’instar des autres Etats membres des Nations Unies, la Mauritanie est passée mardi 19 janvier 2021, devant le Comité des droits de l’homme des Nations Unies lors du 3ème cycle de l’Examen Périodique Universel (EPU). Il s’agit d’un mécanisme qui  revient tous les quatre ans et qui est chargé d’éplucher la situation des droits de l’homme dans chaque Etat membre de l’Organisation des Nations Unies. Durant cet examen, un certain nombre de recommandations sont formulées à l’intention des Etats qui peuvent les accepter ou les rejeter. L’examen se déroule sur la base de trois groupes de rapports. Le rapport national, celui de l’Etat examiné, présenté par la délégation officielle et qui consigne tous les progrès réalisés dans le domaine des droits de l’homme dans le pays. Le rapport des Nations Unies qui contient un certain nombre d’informations délivrées par l’équipe pays des Nations Unies et celles des rapporteurs. Et enfin, le rapport alternatif fourni par les ONG nationales et internationales et qui donne des informations contradictoires par rapport au document de défense présenté par le gouvernement. Dans ce jeu de paroles, un groupe de pays est désigné pour servir d’intermédiaires entre les Etats examinateurs et les Etats examinés. C’est la Troïka. Pour la Mauritanie, la Troïka est composée de la Chine, de la Grande Bretagne, de l’Irlande, entre autres

En 2015, lors du deuxième cycle de l’EPU, la Mauritanie avait rejeté un certain nombre de recommandations. Parmi elles, celles relatives à la peine de mort, à l’invitation permanente aux procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme, c’est-à-dire la permission accordée aux rapporteurs de visiter le pays, la ratification du Statut de Rome portant Cour Pénale Internationale (CPI), les questions liées à l’orientation sexuelle (droits entre époux de même sexe), la suppression du crime d’apostasie, la levée d’un certain nombre de réserves, en particulier sur le Pacte international sur les droits civils, politiques et la Convention pour l’élimination de toute forme de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF).

La Mauritanie avait aussi rejeté la recommandation relative à la ratification d’un certain nombre de convention des droits de l’homme, notamment certains protocoles liés à la peine de mort, le protocole facultatif sur la CEDEF reconnaissant la compétence du Comité pour accepter et recevoir les plaintes de la part de citoyens mauritaniens. Egalement rejetée, la reconnaissance d’un certain nombre d’organes de traités qui faciliteraient cette même compétence.

Contexte favorable

En 2015, la Mauritanie avait accepté 134 recommandations sur les 140 formulées à son égard, soit un taux de 96%. Aussi, plusieurs observateurs pensent que la Mauritanie passe l’EPU 2020 dans un contexte politique plutôt favorable, avec l’ouverture du régime actuel qui a initié depuis son arrivée au pouvoir une série de rencontres et de dialogue avec les leaders de l’opposition, un plus grand engagement dans la promotion des droits de l’homme d’une manière générale. Des institutions, comme la Commission nationale des droits de l’Homme (CNDH) travaille sans aucune entrave, les ONG également sont mises dans des dispositions meilleures dans le déroulé de leurs actions.

Beaucoup de mesures ont été également prises pour prendre en compte les recommandations de 2015, comme l’adoption d’une loi incriminant la torture en Mauritanie depuis 2016, la mise en place d’un Mécanisme national de prévention de la torture (MNPT), la Mauritanie étant le deuxième pays, après la Tunisie, à adopter un tel mécanisme dans la sous-région. Sont également cités, le renforcement de capacité de la société civile, avec la naissance d’un certain nombre d’ONG spécialisées dans la torture et les sanctions infligées à des agents publics pour des actes de torture, comme la radiation et l’emprisonnement d’agents du Groupement général de la sécurité routière, celui des gardes de la prison de Dar-Naïm après la mort d’un détenu. La large liberté accordée à la CNDH et au MNPT pour des visites inopinées dans des centres de détention, comme les commissariats de police, les brigades de gendarmerie et les prisons, sont aussi mentionnées à l’actif des progrès dans le domaine des droits de l’homme en Mauritanie.

Dans le domaine de l’esclavage, l’Etat cite la mise en œuvre des 29 points inscrits sur la Feuille de route de la Rapporteuse des Nations Unies sur les formes contemporaines de l’esclavage, la création de l’agence Taazour chargée de la lutte contre les disparités sociales et la lutte contre les séquelles de l’esclavage, la tenue de quelques procès ayant abouti à une certaine jurisprudence dans le domaine. Mais aussi, la création par décret d’une Journée nationale de lutte contre l’esclavage, les campagnes de sensibilisation menées par la CNDH et un ensemble d’acteurs de la société civile, et l’augmentation cette année du budget accordé aux tribunaux spéciaux chargés de l’esclavage ainsi que la mise à leur disposition d’un personnel étoffé, juges d’instruction et greffiers.

Les avancées dans les droits de l’homme

Parmi les avancés dans le domaine des droits de l’homme, les observateurs citent aussi l’adoption d’un certain nombre de textes, ce qui est perçu comme une véritable avancée dans ce domaine en Mauritanie, comme le vote par l’Assemblée Nationale, le 11 janvier dernier, de la loi sur les associations, avec l’introduction d’un régime déclaratif à la place du régime des autorisations institué depuis 1964. Il y a également la loi contre le trafic illicite des migrants qui remplace celle de 2003, la loi instituant la CNDH qui modifie et remplace l’ancienne loi, permettant ainsi à l’institution de bénéficier du Statut A des institutions nationales des droits de l’homme conformément aux Principes de Paris. La CNDH est ainsi redevenue une institution indépendante, efficace et crédible aux yeux des partenaires. Sur le plan des droits économiques, sociaux et culturels, des avancées récentes sont mentionnées, comme l’assurance maladie accordée aux indigents, l’élargissement de l’âge de la retraite à 63 ans, l’augmentation de la pension de la retraite, les actions menées dans le cadre de la lutte contre la pauvreté, le droit à l’éducation, à la santé et au travail qui se serait beaucoup amélioré. Autres mesures à signaler, les avancées dans le domaine de la santé de la mère et de l’enfant, la promotion des droits de la femme, la formation et le renforcement de capacité des acteurs de la société civile et des agents de l’Etat dans divers domaines.

Mais selon plusieurs acteurs et activistes de la société civile, beaucoup reste encore à faire, notamment dans le domaine du règlement du Passif humanitaire relatif aux douloureux évènements de 89-91 (déportation massive de populations, massacre de civils, exécution extrajudiciaire, épuration à connotation ethnique au sein de l’administration civile et militaire, etc). Cette question mérite, selon les organisations de défense des droits de l’homme, un règlement consensuel et définitif par le biais d’une justice transitionnelle. La question de l’esclavage reste entière, les abolitionnistes dénonçant des parodies de justice pour liquider, sans aucun respect des procédures, des dizaines de dossiers pendants depuis plus de dix années devant les tribunaux, comme le prouvent les récents procès à Nouadhibou, Néma et à Kiffa.

L’agence « Taazour » est aussi vivement critiquée dans ses démarches, avec une OPA sur la question de l’esclavage et de ses séquelles alors qu’elle est sensée apporter des réponses aux victimes.

Beaucoup souhaite enfin que la Mauritanie revienne sur un bon nombre de réserves apportées à des recommandations jugées pertinentes, comme ce refus d’accepter la visite des rapporteurs dans ce qui est appelé l’invitation permanente aux procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme. La Mauritanie doit aussi accepter la compétence du comité sur la CEDEF à recevoir les plaintes individuelles émanant de citoyens mauritaniens. L’Etat doit aussi se pencher sur l’élaboration d’une stratégie nationale pour le renforcement de la cohésion sociale et d’harmoniser les actions entreprises dans la promotion de la protection des droits de l’homme en élaborant et en mettant en œuvre un Plan d’action national qui devra fédérer les actions éparpillées initiées par les différents acteurs.

Cheikh Aïdara


Mauritanie : des haltes providentielles construites pour les éleveurs, convoyeurs et animaux

Près d’Aghchorguitt, le Projet d’Appui au Pastoralisme au Sahel-Mauritanie (PRAPS-MR) a financé la construction et l’aménagement, de locaux flambant neufs pour les animaux convoyés. Le Projet a aussi pris en charge le financement d’un hangar de 120 mètres carrés pour servir de gîte de repos et d’abris pour les éleveurs, les propriétaires d’animaux et autres convoyeurs de bétail en transit.

Le vieux Abidine au milieu de son troupeau – Crédit Aidara

Fonctionnel depuis avril 2019, l’aire de repos de la zone « Robinet » s’étend sur une surface totale d’environ 400 mètres carrés. Elle comprend, en plus d’une salle de conservation d’intrants, une rampe d’embarquement et de débarquement des animaux, un forage fonctionnant à l’énergie solaire et six abreuvoirs. Cet espace, ouvert et aménagé, est devenu un point de convergence de nombreux éleveurs et convoyeurs d’animaux venus de plusieurs coins du pays.

Mohamed Ould Abidine, le vieil éleveur de Tayef

« Je viens de la localité de Tayef, et je convoie 206 têtes de moutons vers Nouakchott […] et l’aire de repos de Robine, c’est une providence.» explique Mohamed Ould Abidine, 70 ans, et propriétaire d’animaux. Il ajoute : « De l’eau, des pâturages, des locaux où nous reposer et reprendre des forces avant l’étape finale. Mes animaux arriveront à Nouakchott dans des conditions qui me permettront de les vendre à bon prix ».

Mohamed Abidine – Crédit Aidara

Se rappelant du passé, il déclare que cet espace était désert du point de vue des infrastructures. Il n’y avait pas de rampes, ni de point d’eau, ou de locaux où s’abriter durant les fortes intempéries. Le septuagénaire, originaire du Chargh mauritanien, et qui est encore tenace comme l’arbuste du désert, tient bon sa pratique d’élevage.

Malgré son âge avancé et une stature physique diminuée, il arrive encore à supporter la pénibilité des longs voyages. Pour lui, se reposer à l’aire de repos de Robine est « une tradition voire un passage obligé ». Et de renchérir : « Le voyage direct sur Nouakchott est long et fatiguant. Il a un impact négatif sur nous et les animaux, mais heureusement, l’aire de repos de Robine est là pour nous soulager ».

Mohamed Moustapha Babe – Crédit Aidara

Mohamed Moustapha Ould Babe, gérant de l’aire de repos de Robine

Originaire d’Aghchorguitt, la quarantaine environ, Moustapha Ould Bah, est le gérant de l’aire de repos de Robine, depuis avril 2019. Le comité de gestion de l’infrastructure l’a désigné pour gérer l’aire de repos. Auparavant, il avait travaillé pendant une trentaine d’années comme gérant d’un forage mais qui n’est plus fonctionnel. « J’aime mon métier. Je viens ici le matin, et je reste là jusqu’à 15 heures et je rentre. Pendant les périodes de fête, je travaille davantage pour servir les éleveurs de passage. Je leur ouvre les robinets et les bâtiments de repos, pendant que leurs animaux broutent l’herbe alentour », explique Mohamed M. Ould Babe. Pour nous signifier l’importance de cette aire de repos du bétail, il décrit : « Nous recevons jusqu’à trente camions par jour, particulièrement pendant les deux grandes fêtes religieuses, Id Al Fitr et Id Al Adha […] Les animaux viennent de Fassala, Djiguenni, Timbédra, et d’autres localités lointaines des deux Hodhs et de l’Assaba ».

Selon le Directeur technique du PRAPS-MR, M. Mohamed Vadel Néma, « la construction des aires de repos répond à un réel besoin ». Selon lui, l’emplacement des principales zones pastorales implique que les animaux sont convoyés sur des axes de commercialisation relativement longs. L’absence d’aires ou de gîtes de repos le long de ces axes ne permet pas de maximiser l’embonpoint des animaux pour une meilleure valorisation dans les marchés terminaux. « Il est prévu de renforcer les intrants par la mise à disposition sur place de produits vétérinaires et d’aliment de bétail. Les lieux pourront également attirer plusieurs activités, comme le commerce, la restauration et des services de Michelin etc… » conclut-il.

 Cheikh Aïdara



Projet de loi en Mauritanie : la liberté des associations compromise

Ni le plaidoyer de la société civile mauritanienne ni les pressions internationales pour amener la Mauritanie à respecter les termes de sa propre Constitution et la législation internationale en matière de liberté d’association ne semblent avoir fait plier le gouvernement.

La balle est aujourd’hui, selon plusieurs acteurs de la société civile et organisations internationales, dans le camp du Parlement mauritanien, qui doit rejeter le projet de loi que le gouvernement vient de lui soumettre pour approbation. Dans un communiqué conjoint, plusieurs ONG nationales et internationales estiment que « la nouvelle loi compromettra l’exercice du droit à la liberté d’association », reconnue pourtant par la Constitution mauritanienne dans son article 10 et les conventions internationales ratifiées par la Mauritanie.

Cette loi, une fois votée, selon Amnesty International ainsi que la vingtaine d’organisations qui ont signé le communiqué de protestation, la Mauritanie se singularisera sur le plan mondial, comme l’unique pays qui oblige les associations au régime de l’autorisation étatique préalable. Cette mesure est d’autant plus condamnée qu’aux yeux de ses détracteurs, elle a été prise sans aucune consultation avec les associations dont les préoccupations ont été occultées, dans un passage en force, qui ne se justifie pas, selon elles.

Certaines associations non reconnues par l’Etat

Pour ces organisations, « le régime de la déclaration est le seul conforme aux règles en vigueur dans les pays qui respectent les dispositions internationales sur la liberté d’expression et de pensée ».
Ainsi, quatre organisations au moins peinent à se faire reconnaître et à exercer librement leurs activités. Il s’agit du mouvement IRA, TPMN, l’Association des Veuves mauritaniennes et l’Union des Jeunes volontaires. Certaines de ses organisations courent derrière une reconnaissance depuis plus de vingt ans, d’autres, depuis plus d’une dizaine d’années.

Sont particulièrement visés, certains articles jugés liberticides dans la nouvelle loi, notamment l’article 6, qui stipule qu’aucune association ne peut être créée sur une base ou pour un objectif contraire à l’Islam, à la Constitution, aux lois en vigueur ou pour des activités de nature à porter atteinte à la sécurité des citoyens, à l’unité nationale, à l’intégrité du territoire, à la forme républicaine de l’Etat ou aux bonnes mœurs. Les détracteurs de la loi soutiennent que les autorités pourraient utiliser des arguments religieux, par exemple si elles jugent que l’objectif de l’association est contraire à l’Islam ou menace l’unité nationale ou les bonnes mœurs pour empêcher à des associations d’exercer leurs droits.

Il s’agit aussi de l’article 24, qui exige de la part des associations la communication de leur rapport d’activités et financiers, au plus tard le 31 mars de chaque année, faute de quoi, elles pourraient être suspendues. Les organisations réfractaires à la loi considèrent que les exigences de transparence dans le financement des associations ne doivent pas peser comme une menace sur la liberté d’association. Ils fustigent également que la mesure tendant à limiter les activités des associations à un seul domaine. Comme exemple, les associations ne pourront pas défendre en même temps la femme et l’enfant. Déjà, depuis 2016, les associations ne peuvent plus organiser de manifestations sans l’autorisation du « Hakem ». Les associations non reconnues sont aussi interdites d’activités publiques.