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Les membres du syndicat des agriculteurs initiés sur les questions d’état-civil, le foncier et l’assurance maladie

En marge du 2ème Congrès du Syndicat des Agriculteurs de Mauritanie (SAM) qui regroupe les paysans issus des classes victimes des séquelles de l’esclavage, des explications ont été fournies par les experts du Bureau International du Travail (BIT), de la Banque Mondiale et de Save The Children, les principaux partenaires du SAM, sur les questions liées à l’état-civil, au foncier et à l’assurance maladie. C’était au cours d’un atelier organisé le 31 mars et le 1er avril 2023 à Nouakchott.

Table officielle à l’ouverture de l’atelier – Crédit Aidara

Le 2ème congrès du Syndicat des Agriculteurs de Mauritanie (SAM) s’est achevé le 31 mars et le 1er avril 2023 par un atelier de sensibilisation des membres sur l’accès à la propriété foncière, à l’état-civil et à aux soins de santé par le biais de la Caisse Nationale de Solidarité en santé (CNASS), un régime d’assurance maladie volontaire, initié par les pouvoirs publics il y’a environ six mois et dont la direction a été confiée à l’ancienne ministre de l’Enseignement Supérieur, Amal Mint Cheikh Abdallahi.

Vue partielle des participants

L’ouverture de l’atelier a été marquée par un échange de discours entre le Secrétaire général du SAM, le représentant du Point Focal du BIT, celui du FAO, de la CNASS et de Save The Children.

Dawa Moustahdi – Crédit Aidara

Après avoir remercié les partenaires internationaux qui soutiennent sa structure dans l’amélioration des conditions de vie et de travail de ses camarades, le Secrétaire général du SAM, qui a été reconduit dans ses fonctions lors du congrès, M. Dawa Ould Moustahdi, a exhorté les membres à plus d’engagement et d’abnégation.

Promouvoir une définition appliquée de l’Emploi Rural Décent (ERD)

Dans son allocution, Mark Ninerola, Coordinateur du Projet BRIDGE du BIT, a mis en exergue la complexité et la sensibilité pour la plupart des professions rurales de bénéficier des avantages du travail décent, notamment les petits producteurs et les travailleurs rurales indépendants, qui ne sont pas couverts par la législation nationale.

Mark Ninerola-Crédit Aidara

Il considère d’une part, que l’application du travail décent est complexe et ambitieuse pour être appliquée dans le contexte rural et que d’autre part, des structures comme le SAM, sont conscientes de la place centrale qu’occupe la qualité des emplois dans le développement rural durable.

En d’autres termes, Mark Ninerola estime que « l’absence de définition concertée de l’emploi décent en milieu rural risque de conduire à des objectifs peu ambitieux et difficiles à mesurer ainsi qu’à un faible niveau de responsabilité ».

Vue partielle des participants – Crédit Aidara

Mark Ninerola a mis l’accent sur les six dimensions prioritaires de l’emploi décent, citant la Convention 141 de 1975 sur les organisations des travailleurs ruraux. Selon lui, le SAM doit engager un plaidoyer pour étendre la législation du travail à l’agriculture et aux professions rurales informelles, et en second lieu, introduire des solutions innovantes pour promouvoir le travail décent dans la pratique aux bénéfices de ses affiliés.

Travailler avec les partenaires

Diallo Mamadou – Crédit Aidara

Diallo Mamadou de la FAO s’est étendu sur des éléments de connaissance sur son organisation et ses relations étroites avec le monde rural et la paysannerie en particulier. Il déclare que la FAO travaille avec le SAM sur les questions liées au foncier, à la protection sociale et à l’état-civil.

L’objectif de la FAO dans ce cadre consiste, selon lui, à promouvoir le travail décent dans le monde rural, avec l’aide de tous les partenaires.

Assurer une garantie médicale aux paysans

 Abordant la question liée à la couverture médicale volontaire, principal objectif de la CNASS dont il assure la coordination technique, Malal Diop, a mis en exergue l’engagement de sa structure à œuvrer avec les autres partenaires et les groupements organisés comme le SAM, selon des modalités précises pour étendre l’accès universel aux soins.

Malal Diop – Crédit Aidara

Malal Diop a mis en exergue le sous-financement de la santé dans le budget de l’Etat (6 à 7%), la faible qualité et l’iniquité dans l’accès aux soins. Selon lui, la CNASS est venue réparer un dysfonctionnement, car 53% des dépenses totales en santé sont supportées par les ménages au moment où 70% d’entre eux ont peu accès à la santé à cause des barrières financières.

Pendant que seuls 12% de la population travaillant dans le secteur formel (public et privé) et 18% des indigents bénéficient de la couverture médicale universelle, 70% des travailleurs du secteur informel sont exclus de ce système. C’est dans ce cadre qu’intervient la CNASS pour protéger la population du secteur informel contre le risque maladie à travers un régime social d’assurance maladie volontaire et contributif.

Vue de la salle – Crédit Aidara

A travers ce modèle, les ménages versent une cotisation annuelle de 250 MRU (minimum de 6 personnes) et l’Etat verse le reste, 450 MRU, soit un total de 700 MRU par personne et par an.

Pour le moment, la CNASS n’est présente qu’à Nouakchott et au Brakna, avec un projet d’extension progressive vers les autres villes et localités du pays.

L’avenir de la Mauritanie dépend de sa réforme foncière

Selon Manuel Mane, Consultant indépendant auprès de la Banque Mondiale, engagé dans la nouvelle réforme foncière en cours, « l’avenir de la Mauritanie dépend de sa réforme foncière ».

Manuel Mané – Crédit Aidara

Il a évoqué le travail en cours avec le Ministère des Finances, notamment la Direction des Domaines, sur une méthodologie basée sur les relations avec les autorités locales et à travers la législation foncière mauritanienne pour faciliter l’accès aux terres de culture en milieu rural.

Le travail consiste dans sa phase pilote, dans la clarification et la sécurisation foncière, pour résoudre l’un des problèmes les plus récurrent auxquels font face les petits producteurs agricoles, c’est-à-dire l’accès à la propriété foncière.

L’accès à l’état-civil, un cauchemar pour les familles pauvres

« L’obtention des actes d’état-civil est l’une des questions les plus difficiles auxquelles sont confrontés les enfants en Mauritanie, surtout à l’intérieur du pays, en raison d’un certain nombre de facteurs… ». C’est le constat fait par Aïssata Bâ, chargée de protection auprès de Save The Children, lors de la rencontre. Selon elle, un consultant a été recruté pour assurer l’objectif fixé d’enrôler plus de 450 enfants dans les différentes zones d’intervention de son organisation.

Aïssata Bâ – Crédit AIdara

La mission du consultant s’est déroulée entre le 10 janvier et le 21 mars 2023 et a englobé toutes les régions du pays, avec comme objectif d’examiner sur le terrain les obstacles qui empêchent les enfants d’obtenir leurs papiers d’état-civil. Il s’agit surtout de la méconnaissance de l’importance des documents, le manque de moyens pour l’accès aux tribunaux et centres d’état-civil, la complexité des procédures, entre autres.

Cheikh Aïdara


Fâchés sur Toute le Ligne

Ces deux figures du monde mauritanien des affaires, actionnaires de l’opérateur Mattel, se livrent un combat acharné. Ce qui inquiète leur partenaire Tunisie Telecom, et même le Palais.

Bouamatou (à gauche) et Béchir ( à droite) – La Dépêche

Il y a quelques mois encore, la scène aurait paru surréaliste à Nouakchott. D’abord, parce que les puissants préfèrent régler discrètement leurs comptes, mais aussi parce que Mohamed Ould Bouamatou (MOB) et Béchir El Hassen sont intimement liés. Et ce, de longue date.

Le 1er mars, c’est pourtant devant les journalistes que le premier a demandé à ses avocats d’exposer publiquement les griefs qu’il nourrit à l’égard du second. D’après ses conseils, trois sociétés contrôlées par Béchir El Hassen et sa famille auraient fait défaut sur des remboursements dus à la Générale de banque de Mauritanie (GBM, propriété de Bouamatou), pour un montant total de 200 millions d’ouguiyas (5,5 millions de dollars). Une dette que les mis en cause contestent.

En octobre 2022, le patron de Bouamatou SA (BSA) avait déjà déposé plainte contre Béchir El Hassen pour des opérations financières liées à Mattel, dont ils sont actionnaires à hauteur de 24,5 % chacun. Surtout, il avait obtenu que son partenaire soit arrêté, le 13 octobre, alors qu’aucune enquête n’avait été encore menée. Après avoir passé près de vingt-quatre heures dans les locaux de la Sûreté nationale, El Hassen avait recouvré la liberté, lui aussi grâce à ses relations. Issu d’une grande famille impliquée en politique de longue date, Béchir El Hassen est une figure du monde des affaires. Actif dans les secteurs de l’assurance, de la pêche, des télécoms, du BTP, il représente aussi des marques internationales.

Derrière ce conflit certains devinent les ambitions du patron de BSA, qui, après avoir souhaité sortir du capital de l’opérateur Mattel, veut maintenant en racheter la majorité des parts. Mise en vente depuis plus de dix-huit mois, la société, dont Tunisie Telecom détient 51 % du capital, est également convoitée par Sonatel, la filiale sénégalaise d’Orange. En difficulté pendant plusieurs années, Mattel a retrouvé une bonne santé financière. En 2021, sa valeur a été estimée à 100 millions de dollars. Bouamatou y voit l’occasion de regagner une partie du pouvoir économique et de l’influence qu’il avait perdus au cours de ses dix années d’exil, lorsque ses relations avec Mohamed Ould Abdelaziz, alors chef de l’État, s’étaient dégradées.

Réfugié en 2010 à Marrakech, celui que l’on présente à l’époque comme l’homme le plus riche de Mauritanie finit par partir pour Bruxelles à la demande du Maroc. Durant cette période, il vend certains de ses intérêts en Mauritanie, notamment dans le secteur du ciment, tout en dénonçant l’acharnement du pouvoir contre lui. En représailles, il consacre une partie de sa fortune à alimenter une guérilla médiatique contre Mohamed Ould Abdelaziz.

À cette époque, ses liens avec Béchir El Hassen (dont le frère était marié à sa fille aînée) sont déjà distendus. Véritable chef de clan, Bouamatou n’aurait pas digéré que son partenaire chez Mattel soit parvenu à rester à Nouakchott et à échapper à la colère du président. Tunisie Telecom, l’actionnaire majoritaire de l’opérateur, se félicite, lui, d’avoir conservé un canal de discussion avec le pouvoir. Quand, en 2015, l’État réclame 60 millions de dollars pour renouveler la licence 2G, El Hassen obtient que la facture soit divisée par quatre et évite ainsi une cessation d’activité.

Si lui et Bouamatou sont aujourd’hui coactionnaires de cet opérateur, ils le doivent au père de Béchir El Hassen, Moulaye, qui a été l’un des principaux mentors de MOB dans le monde des affaires. Dans les années 1990, il l’a fait entre autres entrer au conseil d’administration de la Banque mauritanienne pour le commerce international (BMCI).

Profitant du lobbying du chef de l’État sénégalais Macky Sall en faveur de Moustapha Ould Limam Chafi, opposant mauritanien, ex-éminence grise du Burkinabè Blaise Compaoré et actuel conseiller du Nigérien Mohamed Bazoum, Bouamatou finit par rentrer à Nouakchott en 2020 avec l’accord du président Ghazouani. En contrepartie, le Palais attend de lui un minimum de discrétion. Mais MOB n’entend pas jouer les seconds rôles. Il réclame que les comptes des entreprises publiques soient de nouveau domiciliés au sein de sa banque, et demande une compensation financière pour son exil orcé. En 2021, il tente aussi de faire élire sa fille à la tête de la Fédération des institutions financières.

Le Palais s’est gardé jusque-là de toute intervention, mais l’affrontement des actionnaires de Mattel ne le laisse pas indifférent au moment où le pays veut s’ouvrir à de nouveaux investisseurs. À Tunisie Telecom aussi, la situation provoque un certain embarras, les deux parties n’hésitant pas à faire pression pour imposer chacune leur solution.

Bouamatou milite pour racheter les parts de Tunisie Telecom ; Béchir El Hassen, lui, exige de pouvoir sortir du capital et promet qu’il sollicitera un arbitrage s’il n’est pas entendu.

L’hypothèse d’une issue négociée reste incertaine. Au-delà de la plainte qu’il a déposée contre El Hassen, Bouamatou a remis en cause la répartition de leurs avantages respectifs. Ainsi, la GBM accueillait les comptes de l’opérateur, et une autre entreprise de MOB assurait ses personnels, pendant que Béchir El Hassen couvrait les risques liés aux équipements. Ce n’est plus le cas depuis la fin de 2022. Avec l’accord de Tunisie Telecom, les sociétés de Bouamatou ont en effet récupéré l’ensemble des contrats d’assurance, mettant un peu plus El Hassen sur la touche

Julien Clemençot
Jeune Afrique


Le syndicat des agriculteurs mauritaniens tient son 2ème congrès et renouvelle ses instances au milieu d’importants défis

La salle de réunion de la Mairie de Teyarett (Nouakchott-Nord) a abrité, le 29 mars 2023, le 2ème Congrès du Syndicat des Agriculteurs de Mauritanie (SAM), avec l’appui de plusieurs partenaires, dont le Bureau International du Travail (BIT), Save The Children et Via Campesina (voix des paysans). Au cours de cette rencontre de quatre jours, les instances dirigeantes ont été élues avec la reconduction du Secrétaire général du syndicat, Dawa Ould Moustahdi.

Cadres du SAM et partenaires à l’ouverture du congrès – Crédit Aïdara

Elles sont venues de toutes les régions du pays, masses compactes d’hommes et de femmes dont l’écrasante majorité vient des classes serviles. C’est la deuxième fois, au cours du congrès ordinaire qui s’est ouvert mercredi 29 mars 2023 à Nouakchott, que les membres du Syndicat des Agriculteurs de Mauritanie (SAM) choisissent leurs instances dirigeantes, à travers l’élection d’un nouveau Secrétaire Général, d’un nouveau Conseil Général et d’un nouveau Comité Exécutif. Une commission de désignation présidée par Mohamed Ould Ahmed Deya a supervisé le scrutin qui s’est déroulé dans une atmosphère calme et sereine.

Le Secrétaire générale lors de sa prise de parole – Crédit Aïdara

Le 2ème congrès ordinaire du SAM a été marqué par la présentation du Rapport moral du Secrétaire général sortant, en présence de Marc Ninerola, représentant du Point Focal du BIT et Aboubekry Dieng, Coordinateur du Projet MAP 16 au BIT, Aïssata Bâ de Save The Children et Malal Diop, de la Caisse Nationale de Solidarité en Santé (CNASS), entre autres.

Lutte pour les droits

Le Secrétaire Général présente son rapport moral – Crédit Aïdara

Dans son rapport, le Secrétaire Général du Syndicat, Dawa Ould Moustahdi, a énuméré les activités menées par son organisation depuis la première réunion de Kaédi en fin juillet 2016. Il a rappelé les différents combats que le syndicat a mené pour préserver les intérêts de ses membres, citant l’affaire de l’homme d’affaires qui a voulu léser les paysans de Dar-El Barka dans la Moughataa de Boghé au Brakna, le problème de Daghveg dans la Moughataa de Barkéol en Assaba lorsqu’un administrateur tenta de clôturer une partie des terres agricoles des habitants et le problème similaire dont ont failli être les victimes les populations de Maghta-Lahjar au Brakna.

L’esclavage au cœur du combat

Des congressistes venus de toutes les Wilayas – Crédit Aïdara

Il surtout mis en exergue les appuis dont le syndicat a bénéficié auprès de certains partenaires, dont le BIT, notamment dans le domaine de la lutte contre l’esclavage, et l’apport important apporté dans ce cadre par SOS Esclaves et Save The Children.

Il a mentionné ainsi les ateliers de formation et de sensibilisation que le BIT a dispensée aux membres du syndicat, en février 2021 à Kaédi et à Kiffa, puis en avril 2021 à Kaédi, sur la résolution des conflits fonciers, l’enrôlement des enfants et la situation des femmes rurales.

L’art comme arme de libération

Ambiance détendue lors du Congrès – Crédit Aïdara

Le Secrétaire général a cité l’art comme vecteur de prise de conscience et de creuset culturel, mais surtout d’arme de lutte qui a été utilisée selon lui dans les années 80 pour éduquer les agriculteurs dans la lutte pour la conquête de leurs droits. En 2016, souligne-t-il en substance, deux ateliers ont été organisés dans ce cadre à Timbedra et à Koubenni, pour échanges d’expériences en partant de la lutte menée au niveau de l’Aftout, de Leegueylatt et des deux Hodhs.

Les femmes rurales au cœur des défis

Forte mobilisation des femmes rurales – Crédit Aïdara

Il a évoqué la visite effectuée par les partenaires du projet et le Ministère des Affaires Sociales pour des actions ciblant les femmes rurales issues d’anciennes classes serviles, notamment leur insertion et leur autonomisation économique. Des projets de développement ont été proposés, comme la filière couscous à Bousteila (Hodh Charghi), la clôture du barrage d’Atrid (Hodh Gharbi), la constitution de groupes de vigilance contre l’esclavage, entre le syndicat et SOS Esclaves, des formations sur la loi 031-2015 criminalisant l’esclavage, la prise en charge des survivants de cette pratique, l’identification des cas et leur libération.

Intenses campagnes d’adhésion

Les paysans fortement mobilisés – Crédit Aïdara

Selon le Secrétaire général, la campagne d’implantation menée en 2022 a permis de fortes adhésions dans plusieurs Wilayas, notamment au Gorgol, Brakna, Guidimagha, Assaba, le Tagant et les deux Hodhs. La campagne d’affiliation se poursuit selon lui dans la Wilaya du Trarza, en particulier à Tékane.

L’occasion a été saisie pour rendre hommage au premier Secrétaire Général du Syndicat, le défunt Mohamed Yenge Ould Sidi Ahmed, qui aurait effectué la première campagne d’adhésion à pied.

L’objectif du SAM est d’inclure, selon le Secrétaire général, tous les paysans du pays, de diversifier les adhérents afin qu’il puisse englober toutes les composantes, encourager la participation des jeunes et des femmes dans les instances de prise de décision.

L’état-civil, l’un des principaux problèmes

Une congressiste pose les problèmes des paysannes – Crédit Aïdara

A ce jour, dira le Secrétaire Général, le syndicat a permis l’enrôlement de 446 enfants qui ne disposaient pas de papiers d’état-civil et de 147 femmes qui n’en avaient pas à cause de leur pauvreté et de leur situation antérieure d’esclave.

Aujourd’hui, le Syndicat des Agriculteurs de Mauritanie, compte 19.650 adhérents issus de plusieurs régions du pays.

Via Campesina, ou la paysannerie mondiale

Le représentant de Via Via Campesina en vidéoconférence – Crédit Aïdara

Les congressistes ont suivi la brève allocution prononcée via vidéoconférence par Hatem El Oueni, au nom de Via Campesina (Voix du Paysan), l’organisation internationale de la paysannerie. Hatem Oueini a félicité les congressistes et rappelé le rôle important qu’ils jouent dans la vie socioéconomique du pays. Il a surtout rappelé les jours qu’il a passés en Mauritanie et sa satisfaction par rapport aux activités menées par le SAM au profit du monde rural dans le pays.

Les congressistes posent leurs problèmes

Un paysan énumère les défis du monde rural – Crédit Aïdara

Des échanges ont ponctué la journée. Plusieurs hommes et femmes se sont ainsi exprimés pour poser les problèmes auxquels ils sont confrontés. Les ennemis de l’agriculture, les maladies qui affectent les plantes, le manque d’eau, les animaux errants face à l’absence de clôture grillagée pour protéger les cultures, le manque d’outils modernes de travail, les problèmes fonciers, le non accès aux crédits, l’absence de papiers d’état-civil et la non scolarisation des enfants…Autant de défis qui ont été posés par les différents intervenants, Aïchetou Bâ du Gorgol, Fatimetou Samba de Foum Gleïta (Gorgol), Breïk Ould Daoud de Moït (Gorgol), Oumar Ousmane Dia de Boghé (Brakna), Mohamed Hafedh de Moudjéria (Tagant), Moustapha Ely de Kiffa (Assaba), Ghaber Ould Cheikhna de Jeïgui à Amourj (Hodh Charghi), Ezze Mint Breïk de Maghta-Lahja (Brakna)…

Elections de nouvelles instances

Amadou Dia de Boghé pose les problèmes des agriculteurs dans sa région – Crédit Aïdara

Le deuxième jour du congrès ordinaire du SAM a été marqué par les travaux en commissions et l’adoption des résolutions issues des discussions suivies de formulation d’un certain nombre de recommandations.

Après adoption en plénière des différentes résolutions, les congressistes ont élu leurs nouvelles instances avec la présence d’une seule femme au Bureau Exécutif. Le Secrétaire Général sortant, Dawa Ould Moustahdi a été reconduit dans ses fonctions.

Cheikh Aïdara


En Mauritanie, le premier festival culturel de Djéol à la découverte du patrimoine historique

L’érudit et fondateur des Ecoles Falah, El Hadj Mahmoud Bâ, le guerrier Samba Guéladjegui, le général d’armée Farba Djéol, la bataille de Sendougou, la « Grotte de l’Hyène », la montagne Hayré Youlndé… Des vestiges riches d’un passé glorieux que le premier festival culturel de Djéol, organisé du 17 au 19 mars 2023, a permis de déterrer.

Le président Ould Ghazouani lors de la cérémonie officielle d’ouverture du festival – Crédit Aidara

Le festival de Djéol a vécu, avec la présence effective du président de la République, Mohamed Cheikh Ghazouani, plusieurs membres du gouvernement dont le ministre de la Culture, Mohamed Ould Soueidat, les élus de la région du Gorgol et l’omniprésent maire de Djéol, Ly Oumar Abdoulaye.

Ghazouani lors de la course des pirogues, entre le Wali du Gorgol (en tenue bleue) et le ministre de la Culture – Crédit Aidara

C’est la première fois que le festival des villes anciennes sort de son circuit traditionnel. Depuis son lancement en 2015, il était entièrement circonscrit aux cités de Chinguitty, Ouadane, Oualata et Tichitt. L’organisation pour la première fois d’un tel évènement dans la Vallée est une manière de « consolider l’unité nationale et la cohésion sociale« , selon le ministre de la Culture, artisan du festival.

Le ministre de la Culture (tout sourire) lors de l’inauguration de la stelle « Djéol, cité historique » – Crédit Aidara
Le Maire de Djéol lors de la pose de la stelle « Djéol cité historique » – Crédit Aidara

Si Djéol a été une étape comme les autres, à travers les soirées culturelles, les expositions de produits de l’artisanat local et des autres régions du pays, sans compter les conférences et les concours, le festival a permis de découvrir les richesses culturelles et historiques d’une cité connue par son rayonnement religieux et spirituel, mais aussi par ses rois, ses Farba (généraux) et ses Almamy, avec leurs sempiternelles guerres de domination.

Des exposants lors du festival de Djéol – Crédit Aidara
Entre les pavillons de l’exposition – Crédit Aidara
Jeunes filles de Djéol dans leurs tenues traditionnelles – Crédit Aidara

El Hadj Mahmoud Ba et les écoles Fallah

Là, vécut et mourut El Hadj Mahmoud Bâ – Crédit Aidara
Mosquée de El Hadj Mahmoud Bâ – Crédit Aidara

El Hadj Mahmoud Bâ (1905-1978) est la figure emblématique de Djéol. C’est à partir de ses rues sinueuses qu’il sortira à l’âge de 16 ans pour aller à la conquête du savoir. Il étudia le Coran et les sciences islamiques, fit le pèlerinage à pied en 1924, resta à la Mecque pour parfaire ses connaissances et revint chez lui à Djéol où il créa en 1941 la première école « Falah », avant d’en étendre l’implantation dans plusieurs pays de la religion. Combattu par le colon et les marabouts, il permit à plusieurs centaines de personnes de sortir de l’ignorance, s’opposa à l’esclavage et participa largement à l’expansion de la langue arabe dans sa communauté. Il fut conseiller à la présidence de la République et s’occupa pendant de longues années de l’enseignement dans le pays.

Djéol, un sanctuaire aux fortifications naturelles

Djéol, cité historique au cœur du Fouta, fut le lieu de rudes conflits d’expansion et d’occupation, entre les différentes forces présentes sur les lieux, mais aussi, avec quelques intrusions d’émirats maures avoisinants.

Le conteur Aboud Mamadou Diop – Crédit Aidara

Selon Abou Mamadou Diop, la cinquantaine, chasseur et conteur traditionnel, Djéol accumule un passé historique prestigieux. Ce passé est dominé par les récits presque mythiques du guerrier Samba Guéladjégui, sorte de Robin des Bois du Fouta, dont les exploits ont longtemps nourri une émission matinale de Radio Mauritanie et continuent de bercer la mémoire collective de tout le Fouta dans ses deux rives.

Djéol est essentiellement peuplé de Halpulaar et de Soninké, deux communautés qui vivent depuis des siècles en totale symbiose entre la montagne Wali Souba et la montagne Damé, entre une longue procession de villages, Kadel Bedjou, Kadel Nambéri, Maali Tourel, Toundé Makajam des Nianiabé, et d’autres contrées.

L’Oeil de Djéol sur la montagne Hayré Youlndé – Crédit Aidara

Au Nord de Djéol, se tient la montagne « Hayré Youlndé », et son « œil » de vigile. Au Sud, la « Grotte des Perdus », entre Djeumé et le village soninké de Gouri. A l’Est, c’est la « Colline du Prophète », ou « An Nabiu », qui retient dans ses traces picturales ce qui ressemble au pied d’une personne et la patte d’un chameau.

Façade de la Grotte des Hyènes – Crédit Aidara

Au Nord-Est, la Grotte des Hyènes, ou « Sudu Fowru », où des dizaines de grottes restent encore visibles même si leurs anciens funestes occupants ont disparu. Il fut aussi le refuge des féticheurs, d’où son autre nom « Sudu Turu ».

Vue de la grotte des hyènes du côté opposé à la façade – Crédit Aidara

C’est entre la Grotte des Hyènes et la Colline du Prophète que se situe la Colline des Sentinelles, là où les vigiles du colon français surveilleront plus tard les habitants de Djéol.

Vue d’en haut de la cité, sur la colline des Sentinelles – Crédit Aidara

C’est là, entre ces différentes escarpes qui entourent la cité, où se dérouleront les plus célèbres batailles de la cité. Notamment la bataille de Sendougou qui opposa Samba Guéladjégui au Farba Djolof, sur les dunes blanches bordant la rive droite en face de Djéol, où celle l’ayant opposé à son cousin Konko Bou Moussa.

C’est de l’autre côté, sur ces plages blanches, qu’eut lieu la bataille de Sendougou – Crédit Aidara

L’histoire de la brève intrusion de l’émir Sid’Ahmed Bakar, entre les quatre grands guerriers du Fouta, Farba Djéol, Pathé Hamath de Aoueïnat, Farba Kaédi et Abdoul Bakar de Dabiyé, marque l’histoire du Fouta. Même si un territoire lui a été octroyé à Namat, entre Djeuné Guiraye, village de pêcheurs et Aoueïnat, il ne put durablement s’installer dans la région et se retirera plus tard.  

Cité des érudits

Les cimetières de Djéol – Crédit Aidara

Djéol, c’est surtout la cité du savoir islamique. Avec ses nombreux érudits, comme El Hadj Mahmoud Bâ, les frères Tandia, Alpha Hamidou NGaïdé, Alpha Hamady Bâ, Cheikh Abdoulaye et l’érudit maure, Chérif Abdoul Moumine, dont la tombe à Djéol, marque le symbole de son attachement à une terre dont les populations le lui ont bien rendu.

Des dizaines, voire des centaines d’érudits, ont été formées entre les quatre murs de Djéol, caractérisée comme toutes les antiques cités, par ses entrelacs de rues sinueuses et serrées, des concessions ouvertes les unes sur les autres, dans des espaces sans limites où les familles vivent en vases communicants.

Vue plongeante sur Djéol dans sa partie Sud – Crédit Aidara

Aujourd’hui, Djéol connaît une expansion géographique plus au Nord, là où plusieurs familles se sont installées dans des zones plus spacieuses et loties. C’est le Djéol moderne avec ses villas cossues et son architecture qui tranche avec celle de l’ancienne cité, là où baignent les rives du fleuve, avec ses lavandières et ses piroguiers.

De jeunes lavandières au bord du fleuve – Crédit Aidara

Richesses culturelles

L’ambassadeur de l’Union européenne entre les cavaliers – Crédit Aidara

Le festival de Djéol fut l’occasion d’une exhibition culturelle extraordinaire. Les cavaliers aux accoutrements de guerre, fiers sur leur monture, ont été l’objet d’admiration, notamment de la part de l’ambassadeur de l’Union européenne, seul diplomate présent au festival, avec sa collaboratrice.

Course de pirogues – Crédit Aidara
Parade de femmes lors de la course des pirogues – Crédit Aidara

La course des pirogues, avec le panache des compétiteurs et leur vigueur sur les pagaies, a été l’attraction culturelle qui fut suivie avec délectation par le président Ghazouani, entouré pour l’occasion par le Wali du Gorgol et le ministre de la Culture.

Cheikh Aïdara